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66 — Oui ; mais où les trouver ! M. Charpentier se retourna brusquement vers l'huissier et le congédia. Il avait cautionné le négociant. Je vous laisse à penser les remercîments, les actions de grâce dont il fut ac- cablé. On était à ses genoux. Un mois plus tard , ce même né- gociant lui témoignait sa reconnaissance d'une manière singu- lière; il prenait la roule de la Suisse , emportant ce qu'il avait pu réaliser. Après plusieurs aventures de ce genre, aimez donc l'espèce humaine ? Ses opinions politiques ont toujours été inconnues même à ses amis. Dégagé de toute prévention , il appréciait les hom- mes par leurs actions sans faire attention au parti auquel ils appartenaient. Le malheur avait droit à sa commisération quelque fut d'ailleurs l'opinion. Peu après les orages de la ré- volution française, les agens des Bourbons exilés cherchaient partout à se procurer l'argent nécessaire pour subvenir aux besoins d'illustres proscrits. Ils s'adressèrent à M. Charpen- tier qui remit, avec une entière confiance, et sans obligation, une somme considérable entre les mains de Mme la comtesse de S Non-seulement M. Charpentier ne sollicita rien lors- que les Bourbons rentrèrent en France ; mais encore Mme la comtesse de S.... lui ayant écrit pour lui dire que le moment était favorable , que l'on n'avait pas oublié ses services , et qu'il n'avait qu'à laisser entrevoir ce qu'il désirait, il se tut, il n'avait besoin de rien et refusa toute faveur pour lui. Il ne demanda, par l'intermédiaire de Mme S...., qu'une modeste place de 300 fr. pour un de ses amis, et il l'obtint immédia- tement. Dans ses dernières années , M. Charpentier éprouva plu- sieurs faillites. Sa robuste constitution fut altérée par le cha- grin qu'il ressentit de ces pertes considérables. L'amour ex- cessif de l'argent, qui le poussait à s'imposer de nouvelles privations dans l'espoir de récupérer ce qu'il avait perdu, porta un dernier coup à sa santé. Il mourut de misère , mais son avarice ne porta préjudice qu'à lui seul, car l'estime de