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45 arceaux soutenant de fraîches terrasses, les vieux et pittores- ques Carmes déchaux, transformés en caserne , les prés ver- doyants qui la couronnent et la tranquille rivière qui la cô- toie , qu'elle est devenue un des plus beaux sites de Lyon , si riche de beaux sites. Sur ce quai saillit un roc à pic par lequel la montagne semble avoir voulu communiquer avec le fleuve, et sûr un des plateaux, la reconnaissance p u b l i q u e , le hasard ou la flatterie a juché une espèce de statue d'un bizarre a s p e c t , dont l'origine, la date et le nom sont restés inconnus, malgré les recherches consciencieuses el les savantes dissertations des chroniqueurs lyonnais. Chaque idole veut un nom à jeter à l'adoration; la gloire a besoin de savoir sur quelle tête elle a posé son auréole; il faut une légende à tous les monuments , si maigres qu'ils soient, et pour satisfaire à ces conditions, on est convenu q u e cette statue était celle d'un homme appelé tour à tour F l é b e r g , Flébergue, et enfin Jean Cléberg. D'après les chroniques lyonnaises , Cléberg était un offi- cier étranger, au service de François 1 er auprès duquel il com- battit à la bataille de Pavie ; plus tard il s'établit à L y o n , où il fut commerçant, puis échevin ; il fut l'ami du monar- que , et lui prêta de l'argent pour sa rançon. L'histoire cons- tate seulement q u e , de 1533 à 1546, époque de sa m o r t , il distribua , pendant les disettes , des sommes considérables aux pauvres de la cité. La tradition ajoute qu'il aima beau- coup les jolies filles de Bourgneuf, et que, chaque année , il en dotait sept et les mariait aux jeunes gens du quartier. Voilà , certes, un héros célèbre à bien des titres. Quant à la statue , il est à peu près constant que ce n'est point à lui qu'elle fut élevée, mais à un gouverneur du châ- teau d e Pierre-Scise ; et il ne paraîtra pas étonnant qu'alors, comme aujourd'hui, hélas ! on élevât des statues à des h o m - mes inutiles, et qu'on laissât dans l'oubli les bienfaiteurs du peuple.