Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
                                350
  objet d'horreur, et, si on voulait l'asservir aux ignobles
  exigences du pot au {eu, elle se suiciderait; elle trouverait bien
  plus convenable d'aller remplacer son mari au tribunal ou
  nu congrès scientifique que de coudre le moindre boulon
  faisant défaut au haut de chausse conjugal. Il est pourtant
  quelques femmes de lettres veuves ou à peu près ; celles-là
  ont pleuré longtemps un mari général, ou au moins colonel
  mort à Waterloo; il est mort tant d'officiers à Waterloo! mais
  comme celle catastrophe est déjà loin de nous, c'est l'Afrique
  qui est en possession maintenant de priver ces intéressantes
 Arlémises de leurs amours légitimes.
    Les femmes de lettres n'aiment que les sots, ce qui s'ac-
 corde peu avec l'aversion qu'elles ont pour leurs maris.
     Amie de l'humanité^ la femme de lettres fait chorus avec
 tous les philanthropes de profession, les émancipateurs de
 nègres, et tous les individus occupés du progrès social et
 de l'avenir des nations ; race abondante en cœurs sensibles
 pour lesquels le malheureux mourant de faim, parfaitement
 dédaigné tant qu'il n'est qu'innocent, devient bientôt, si peu
 qu'il mérite le bagne, un être prodigieusement intéressant
 et recommandable. C'est une femme de lettres qui la pre-
 mière a demandé à Fieschi un autographe pour son album.
    La femme de lettres professe un grand amour pour les noc-
 turnes vitrioliques de Moupou, qu'elle déchiffre de concert
 avec quelque Sténio à la longue chevelure; elle a la voix fausse,
 et chante comme une repasseuse.
    Dans son intérieur, la femme de lettres rejette le peignoir
pour la robe de chambre, et n'est guère plus serrée dans son
corset que dans ses raisonnements; à l'extérieur, elle revêt le
frac et le pantalon à sous-pieds. A elle les rêveries fantalis-
ques,la vie artistique et les bowls de punch infiniment mul-
tipliés! Elle goûte peu le Champagne, bon tout au plus pour
les grisettes, mais elle proclame l'émancipation du sexe faible
en savourant le rhum, et en fumant du tabac de caporal dans
une pipe culottée.