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252 voulons prendre parti ni pour l'accusation, ni pour la défense; nous ferons abnégation, dans cette circonstance, des i m p r e s - sions qui nous sont restées de cette polémique ; nous voulons simplement examiner si, en l'absence de toute trahison, en- vers son pays, le major-général Martin a mérité l'ovation dont il doit être l'objet. Eh bien! oubliant en ce moment que l'homme auquel on décerne des honneurs publics doit être comme la femme de César, même au dessus des soupçons, nous n'hésitons pas à nous prononcer pour la négative; nous n'hésitons pas à déclarer que le Conseil municipal a commis une faute énorme, faute que l'en traîne ment de la reconnaissance doit excuser peut-être, mais que le Conseil municipal d'aujourd'hui ne doit pas con- sacrer. Nous l'avons dit, décerner à un citoyen les honneurs de la place publique, couler son image en bronze et la vouer à la vénération de tous, c'est l'honneur le plus insigne qu'un homme puisse rêver : pour l'obtenir cet honneur, pour mériter que sa mémoire soitimpérissable, suffira-t-il, au moment où l'on se sépare de tous les biens de ce monde, dévider tout ou par- tie de son coffre-fort ? La reconnaissance des populations ne sera-t-elle plus qu'une question d'argent? Et devra-t-on établir un tarif dans les limites duquel cette reconnaissance pourra se manifester, depuis l'inscription des noms sur une rue ou une place publique jusqu'à l'érection de la statue? Qu'a fait pour la ville de Lyon, le major-général Martin ? Il lui a donné une somme d'argent énorme, si l'on veut, miette imperceptible de son immense fortune, el, pour cela seul, en exposera son image à la vénération du peuple! nous ne savons, mais il nous semble que loin d'être, comme on l'a voulu sans doute, un encouragement pour les autres, une pareille résolution doit être un motif de découragement p r o - fond. Il n'est pas donné à tous les hommes d'amasser une fortune colossale, il ne leur est pas donné à tous, même en enrichissant une famille nombreuse de pouvoir détacher de