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Sait de développer la passion humaine par rapport à une
 situation unique, les unités en resserrant et le fait proposé
et les passions qui lui étaient relatives, en accroissaient na-
turellement l'impression ; loin d'entraver le dessein du
poète, elles concouraient au contraire à le circonscrire
plus fortement, et à le faire ressortir davantage. Je ne
parle pas même des obstacles matériels qui ont dû para-
lyser au-delà de toutes bornes certaines pièces, et entre
autres celles de Racine. Lorsque les spectateurs encom-
braient la scène, lorsque les acteurs craignaient à tout
instant de se heurter aux banquettes où s'asseyaient mes-
sieurs les marquis, il n'était guère possible à la tragédie
de prendre ses coudées franches, de se donner de l'es-
pace, du mouvement, de l'animation. La tragédie a donc
été tout ce qu'elle a pu être, et dans ses conditions im-
posées, elle a (ne l'oublions pas ) produit d'admirables
chefs-d'œuvre, que les intelligences sévères doivent s'ap-
pliquer sans cesse à étudier et admirer, tout au moins
comme savante analyse de passion, comme perfection châ-
tiée de style. La tragédie a certes un passé assez glorieux,
en France, pour mériter d'être rangée au nombre de nos
traditions littéraires toujours vivantes et toujours respec-
tées. Mais il serait plus qu'absurde de vouloir refaire au-
jourd'hui la tragédie grecque et romaine du dix-septième
siècle. Je ne parle pas même de l'extrême difficulté d'at-
teindre à la perfection d'œuvres inimitables par l'exécution,
quoique d'ailleurs si faciles à copier dans leur type inva-
riable et dans leurs procédés communs. Le plus grand
obstacle à l'ancienne tragédie est dans l'anachronisme des
mœurs, des croyances, du langage que notre siècle plus
 que tout autre repousse et condamne. Le romantisme n'au-
rait eu d'autre résultat que de mettre fin aux stériles et