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          MOUVEMENT PHILOSOPHIQUE EN ALLEMAGNE.           203

que nous vient cet amour des petits détails que notre
temps pousse quelquefois jusqu'à la manie ; cette pré-
tention de refaire sans cesse l'histoire au point de vue
de tel petit document récemment découvert. Sans doute
l'histoire est remplie d'erreurs; mais elle est vraie pour-
tant, considérée dans ses grandes lignes. Dans le domai-
ne des faits pas plus qu'ailleurs la Providence n'a permis
que l'homme fût livré à une irrémédiable incertitude, et
l'histoire n'est pas une toile de Pénélope, dont le tissu
doive se défaire et se refaire éternellement. L'humanité
peut errer dans le détail, elle ne se trompe pas sur l'en-
semble. Homère porte pour elle dans la beauté de son
poème la preuve de son existence personnelle. En vain
opposera-t-on un texte contradictoire ; la masse des
affirmations emporte cette négation isolée, fût-elle inso-
luble. Et la physionomie des siècles nous est donnée
comme celle des grands hommes. Les âges se partagent
réellement en siècles de foi, de large vt puissante syn-
thèse, comme en siècles d'analyse et de doute; ils sont,
en somme, ce qu'on a jugé qu'ils étaient. On aura beau
 refaire leur histoire par les petits côtés laissés dans l'om-
bre ; dans la peinture d'un âge comme dans le portrait
d'un homme, il y a une expression générale qui domine
tout, et à laquelle tout se ramène.
   C'est ce qu'ont méconnu les érudits allemands. A
force de chercher la vérité, ils l'ont souvent obscurcie,
semblable à des mineurs qui pour atteindre un filon
cherché, jonchent le sol de ruines et de décombres,
sous lesquels ils enterrent souvent les métaux les plus
précieux. Tel est le caractère des érudits allemands.
Pionniers infatigables, ils ont ouvert toutes les routes ;