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DU CHATEAU DE VAREY. 77 ne cache pas quelque mystère. Auberjon de Maley a ménagé son cheval el, faisant un contour, il se précipite dans la cam- pagne appelant à lui les Dauphinois. II voit au loin un groupe qui se dérobe, le rejoint, l'attaque et porte sa main couverte de sang sur un homme pâle, fou de douleur et qui ne sait ni se défendre ni se nommer. A celte couronne, à ces armes, a son désespoir surtout, Maley a bientôt reconnu la plus grande infortune de la journée; il s'enivre à la pensée delà riche proie dont il vient de s'emparer. Mais il ne peut la conserver seul et les serviteurs dispersés menacent de venir la lui disputer. Il appelle encore etTournon accourt avec quelques cavaliers. Tous ensemble se saisissent du noble comte, se le disputent, prétendent chacun en avoir fait la conquête et finissent par faire un accord. Maley l'avait pris, on en convient, mais il ne pouvait le garder ; Tournon exige la moitié de la rançon et de l'honneur, Maley consent. On arrache l'armure du jeune prince, ou lai enlève le casque qui protégeait sa Gère tête et cachait ses nobles traits ; on le dépouille, chemin faisant, et on l'entraîne avec violence vers les Dauphinois qui croiront à peine à un triomphe aussi complet (1). Cependant la grande armée n'est pas toute anéantie ; çà et là on combat encore et quelques Allemands, quelques Savoi- siens tiennent vaillamment tête à l'ennemi. Le vieux Guil- laume de Boczezel a vu de loin le malheur de la Savoie. Il appelle son fils dans la mêlée ! « Ah ! Hugues ! l'on em- mène prisonnier le comte Edouard, ton seigneur et le mien ! tost, tost après luy, car je suis vielet feble, et durement bles- (1) Chorier prétend que Guillaume de Tournon et Auberjon de Maley « défirent le bassinet du comte de Savoie à l'entrée d'un bois. » Les forêts sont du côté de la montagne. Entre Saint-Jean-le-Vieux et Pont-d'Ain il n'y a qu'une plaine nue, des marécages et la rivière d'Ain.