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Mais il faut avouer que si les événements sont désolants par le
résultat, ils sont faits, par leur caractère dramatique, pour
inspirer le talent d'un historien, et il est vrai de dire qu'iEnéas
Sylvius les a narrés avec une grande supériorité. Déjà, dans
les séances qui précédèrent sa rupture avec Eugène IV ,
l'assemblée avait oublié lamodération et la dignité, mais, une
fois cette rupture consommée, elle ne garda plus aucune me-
sure. Pour avoir une idée de la violence des passions qui
s'y agitaient, il faudrait relire les comptes-rendus des séances
de notre convention nationale. Moins l'émeute grondant au
dehors, moins les canons braqués contre les portes de la salle,
c'était à Bdle le môme tumulte, les mômes vociférations, les
mêmes démentis renvoyés d'un banc à l'autre. Un jour, le dé-
sordre devint si bruyant que l'historien, pour le peindre, a
emprunté l'image d'une bataille : « Il s'éleva, dit-il , une
clameur semblable à l'éclat des trompettes et au frémissement
des chevaux, lorsque deux armées s'ébranlent pour en venir
aux mains (1). » Toutes ces scènes sont rendues avec une
vérité de couleurs, avec une vivacité de mouvement qui nous
y font assister.
   Cependant, bien que l'historien applaudisse aux actes de
l'assemblée, il ne se fait aucune illusion sur le caractère de
certains de ses membres, hommes très—habiles, d'ailleurs,
lesquels obéissaient, non à leur conviction personnelle, mais
bien aux vues intéressées de leurs souverains, et il ne leur
épargne pas les très malins. iEnôas Sylvius ne pense point
qu'il soit permis de se montrer autre que soi môme. Aussi,
le cardinal d'Arles est-il visiblement son héros. Cet homme
singulier, que nous appellerions aujourd'hui une mauvaise


  (1) Quo verbo tan tus exortus est clamor, quantus solet in preeliis tuba-
rum clangor, et equorum fremitus, cum signis eollatis, duo invicem con-
currunt exercitus (Commeniarii, iib 1.).