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BIBLIOGRAPHIE. jg5 ce qui aurait épouvanté la plume de Boileau, soit qu'il eût voulu faire son speech en prose, soit qu'il eût essayé de le rimer en une épitre solennelle et pompeuse, est, hé- las.! ce que nous lisons tous les jours ce que nous enten- dons habituellement désormais à notre foyer , dans les comptoirs, à la bourse, à la chambre'; c'est notre langage national et nos oreilles , plus robustes que celles de nos pères, acceptent ces sons rocailleux avec la même com- plaisance et la même facilité que les rudes palais d'Outre- Manche savourent le gin de la vieille Angleterre. Mais si le gros de la nation parle aujourd'hui le saxon ou l'anglais, si nos relations politiques et commerciales ont fait disparaître, jusqu'aux derniers vestiges, les doux gazouillements de l'hôtel Rambouillet, il est encore quel- ques esprits rêveurs qui s'attardent à la suite des grands écrivains du XVII e siècle et qui ont peine à saisir le fin du beau parler d'aujourd'hui Combien d'hommes, et des plus instruits, n'osent lire le journal à haute voix dans la crainte de rencontrer quelques- unes de ces expressions usuelles dont la prononciation les glace et de trébucher devant les squares (cèkouères) de Bellecour, le steamer (cetimeur) de Liverpool, le tombeau de Longwood (longoude) ou l'histoire de ce sportsman mort du spleen, en buvant un moos de wiski dans son breack au sortir de son yacht. C'est pour ces Français d'un autre âge que M. Au- guste Peyreigne, un jeune et courageux philologue, vient de publier un Manuel de la Prononciation, que nous nous empressons de recommander. Son titre l'annonce , ce Ma- nuel est un dictionnaire des mots français, des expressions étrangères francisées, des noms des villes et des person- nages célèbres qui doivent être prononcés d'une manière particulière. Il ne peut remplacer les gros dictionnaires que chacun a.entre les mains, mais il les complète ; il ne donne ni les étymologies, ni les explications qui grossissent Littré, Bécherelle ou Landais, mais il contient une foule de