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106 LITTÉRATURE. lion superstitieuse du passé, qui désespère de l'avenir. Je combattrai, Messieurs, de toutes mes forces, ces deux tendances également funestes ; toutefois, la première est plus à craindre aujourd'hui que la seconde, et je croira1 faire mon devoir en appuyant davantage du côté de l'ad- miration. Ce n'est point par excès de docilité ni de dé- fiance d'eux-mêmes que les hommes de nos jours sont sujets à se tromper. Eblouis des grandes choses que notre siècle a vues s'accomplir, quelques-uns seraient plutôt tentés de croire que le monde a commencé d'hier, et que tout ce qui nous a précédés n'était que ténèbres et barbarie. Il est bon, en leur montrant ce qu'il y a de grand et de beau dans les civilisations antiques, de les ramener à une vue plus équitable des choses, à des idées plus justes sur les lois qui président au développe- ment de l'humanité. Du reste, Messieurs, les détracteurs des lettres anti- ques n'ont jamais été, même en France, même de nos jours, qu'une faible minorité. Les bons esprits ont tou jours su se garder de cette injustice. Quoique les besoins des temps nouveaux aient appelé l'activité de nos con- temporains dans des voies bien diverses, et que l'étude des langues et des littératures anciennes ne soit plus l'étude unique, exclusive, universelle, comme elle semble l'avoir été à certaines époques, elle n'a pas cessé d'oc- cuper une foule d'hommes éminents, et, malgré des attaques passionnées, notre éducation nationale repose encore sur cette base solide. Ici, qu'il me soit permis de rendre grâce au ministre intelligent et courageux qui vient d'abolir, aux applaudissements de toute l'Europe, les derniers vestiges des concessions regrettables que