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                     PATOIS BRESSAN ET BUGISTE.                           371

autant à prolester qu'à exprimer son étonneraient ; on pourrait
le rendre par le mot Dieu !
    Rien n'est agréable, pour qui comprend la parole bugiste,
comme de l'entendre accentuer lentement par un natif; ainsi
celle phrase :
    Z'incoulri à ne, ou cémont dé Salaiisè,on Iaô,qué na z'in yô
pô de mè; l'ère" t'iquie, sèlà sou sô cou, pouô véravé la téta
d'on flianc, de n'âlrô : gazô bin qui n'âvô rin dins l'eslome.
I m'aguélâves trinquellaminl, avoué sô zous que luiiant que-
mintdé shandaiiias !... Ah! se zava iô mô fouze!... (1)
    Cette langue ne manque pas de difficultés, et je prendrai
pour un bon parleur bas bugiste celui qui me rendra celte
phrase : « S'ils sentent le musc, je n'en veux point. » La
 voici sauf la prononciation : « Si sintont lu m'squô, n'invoua
zin. » Plus habile encore sera le bourgeois qui me dira
 simplement : Bonjour, Bonjor, avec le sifflement intradui-
 sible du paysan. Un indigène seul donnera le coup de langue
 qui doit remplacer la prononciation du j. Encore une phrase
 qu'on ne peut écrire en patois : Ne l'y fie pas, nage toujours.
    L'idiome bugésien s'étend au sud-est du département ; il
 s'arrête à la rivière d'Ain et au Rhône ; ce qui prouve que
jadis régnait là un peuple à qui ces fleuves servaient de limiles;


   (1) « J'ai rencontré à la nuit, au sommet de Salaizo (magnifique roche
coupée à pic, au-dessus de l'antique ville de Sainl-Germain-d'Ambérieux ;
on l'aperçoit de Lyon, à 50 kilomètres de distance ; le chemin de fer de
Genève passe au bas de la montagne qui lui sert de piédestal) un loup qui
n'a point eu peur de moi ; il était là, assis sur son derrière, puis il tournait
la tète, d'un côté, d'un autre ; je gage bien qu'il n'avait rien dans l'estomac.
Il me regardait tranquillement avec ses yeux qui luisaient comme des
chandelles!... Ah! si j'avais eu mon fusil ! »
   Cette réflexion finale peint le montagnard bugiste, amoureux du bruit
de la poudre, chasseur ou braconnier à ses loisirs et facilement soldat.
                                                             A:   v.