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IS mj SURNATUREL
Bien des gens donnent dans les conjectures mystiques et
explorent ce que Ume de Staël a si poétiquement nommé
« le côté nocturne de la vie humaine » qui ne se décident
point pourtant a aller jusques a admettre l'évocation des
esprits. 11 faut a cet égard des grâces de crédulité ou de foi
toutes spéciales, et si elles abondent en Amérique, elles sont
encore assez rares en France pour qu'il n'y ait pas beaucoup
a s'en occuper. Une des seules remarques que je voudrais
faire, c'est que les esprits d'à présent ne sont pas de moins
bonne composition que ceux de l'antiquité : de même que
les anciens esprits obéissaient aux formules de contrainte
de la théurgie égyptienne et qu'ils se rendaient aux somma-
tions du néo-platonisme alexandrin, les nôtres montrent
une singulière docilité a comparaître sur l'appel de ceux qui
ont affaire a eux, et c'est au point qu'il serait bientôt plus
commode, malgré l'apparent obstacle de la barrière entre .
les deux mondes, d'avoir raison des morts que des vivants.
La pratique moderne est d'ailleurs dépouillée du sombre et
terrifiant prestige qui tenait les spectateurs éperdus devant
les anciennes apparitions ; dans ceci s'est introduite comme
dans tout le reste l'élégance dont nos moeurs nous ont ren-
dus jaloux. Ne craignez point que les immondes esprits qu'il
vous plairait d'évoquer viennent a vous sous les traits hi-
deux et repoussants, sous la forme squalide de ces démons,
dont les naïves peintures du moyen-âge, .conformes au type
populaire de la légende, ont tracé l'image sur les murs du
Campo-Santo. Ce costume traditionnel est abandonné. Les
esprits, en leur qualité d'esprits, ne font plus que flotter
dans les airs comme des gaz légers, ils ne sont plus que
des souffles frémissants, ils se penchent invisiblement Ã
l'oreille de leurs interlocuteurs ou plutôt ils n'ont qu'une
voix cachée que peut seul entendre le médium, l'officiant
intermédiaire mis eu rapport avec eux; en sorte qu'il est
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