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l!)8                  CONCOURS DE POÉSIE.

la donnée que l'usage qui en a été fait. Or, l'usage nous en
a paru entaché de prosaïsme et de vulgarité. Nous ne mé-
connaissons pas toutefois que le poète n'ait rencontré çà
et l'a de beaux accents, et qu'un certain souffle fier et pa-
triotique ne domine dans son œuvre, à travers les singu-
larités qui s'y croisent. La région un peu'étrange où l'ode
se suspend n'a pas été sans effluves poétiques, et c'est parce
que nous eu avons été impressionné ainsi, que nous nous
sommes complu a rendre compte avec assez d'étendue de
cette première et estimable composition. .
   En passant a un autre concurrent, qui nous a envoyé, sous
le n° 17, avec la devise : « Si de vous agréer je n'emporte
le prix, etc. » un poème lyrique de plus de 400 vers, nous
serons dans une atmosphère poétique toute différente. Cette
fois, c'est un poète de la Savoie qui annonce ses origines
et déclare paraître au tournoi pour sa terre natale. On dirait
qu'habitué à s'avancer d'un pied prudent dans ses montagnes
entrecoupées de précipices, il imite cette circonspection
dans son essor vers les hauts sommets de la poésie. L'ode
perd avec lui son audace et le désordre de ses inspirations.
S'il se livre au mouvement lyrique, on sent que c'est avec
une certaine sagesse résistante et une alarme secrète de la
raison ou du goût. Une couleur de style tempéré s'en trouve
répandue sur le poème tout entier.
  Voici son début qui ne manque pas de noblesse et d'une
dignité triste et soutenue, propre a préparer les effets lyri-
ques qui suivront.

        Poète voyageur de l'un à l'autre pôle
        Et rejetant son luth muet sur son épaule,
        Il s'était dit, superbe en ses sombres douleurs :
        L'exil pèse à mes reins comme un manteau de glace*,
        Le froid-dédain sourit sur la route où je passe ;
        Je ne chanterai point pour endormir mes pleurs.