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ET DU MYSTICISME. 27 lequel de franches intentions de bien n'empêcheraient pas de mettre un peu d'inoffensive raillerie, je préviendrais les spiritualistes excessifs que c'est souvent a leur insu le jeûne profond de l'esprit qu'ils pratiquent par la mortification de la matière. Veux-je en inférer qu'il n'y a pas de surnaturel ? Le mys- ticisme va-t-il être aussi condamné sans réserve? Dans ce monde ne devra-t-on voir que l'admirable enchaînement des lois naturelles, et faudra-t-il se ranger avec ceux qu'on appelle les rationalistes purs? A Dieu ne plaise que je tombe dans ce sentiment. Ce que je viens de dire soulève une question plus sérieuse, mais qui ne serait pas a mes yeux d'une solution plus difficile. Une école de penseurs, représentée par un jeune et brillant écrivain qui siège à l'Institut, nie péremptoirement l'existence,d'un ordre surnaturel. Voici comment s'exprime à ce sujet l'auteur des Études d'histoire religieuse : « Il n'y « a pas de surnaturel. Depuis qu'il y a de l'être, tout ce qui « s'est passé dans le monde des phénomènes a été le déve- « loppement régulier des lois de l'être, lois qui ne cons- « tituent qu'un seul ordre de gouvernement, la nature, soit « physique, soit morale. Qui dit au-dessus ou en dehors des « lois de la nature dans l'ordre des faits, dit une contradic- « tion, comme qui dirait surdivin dans l'ordre des sub- « stances (1). » Je m'élève, sans hésiter, contre ces téméraires assertions qui n'iraient a rien moins qu'a la destruction de toutes les croyances religieuses. Spéculez tant que vous voudrez sur la nature, imaginez que tous les êtres dépendent nécessairement de ses lois physiques ou morales, portez le plus loin qu'il vous sera (1) Ernest Renan. Éludes d'ftîst. relig., p. 206 «