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72                          NÉCROLOGIE.
rare intelligence musicale, à ce coup d'œil qui fait saisir d'emblée
et décomposer les complications du rbythme dans une page
chargée de notes. Aussi ne fut-il jamais plus remarquable que
lorsqu'au milieu d'un auditoire sympathique et vraiment musi-
cal, il abordait un quatuor inconnu, et, du premier abord, en
surmontait les difficultés, en faisait ressortir les intentions, lui
donnait la vie et la couleur. Comme il avait vécu dans l'intimité
 de presque tous les grands violonistes, il possédait toutes leurs
traditions, il savait avec quels mouvements et quelles nuances
il fallait interpréter les mille facettes du beau idéal, qui brillent
dans les ouvrages si opposés de manières d'Haydn et de Beetho-
ven, de Mozart et de Bocherinni, de Spohr et d'Onslow. M. Bau-
mann aima mieux consacrer ses facultés'à étudier et à faire
connaître les maîtres, qu'à mettre au jour lui-même une grande
quantité de productions, afin de joindre le titre de compositeur à
celui d'exécutant. Il y adroit néanmoins et les trop rares ouvra-
ges qu'il a publiés, sans bruit et sans fracas de réclames, prouvent
que s'il s'est volontairement effacé, ce n'est pas par le manque
d'inspirations ni par l'ignorance de l'art d'écrire, seulement il ne
voulait pas livrer au public des ouvrages ébauchés ou des pasti-
ches, il professait un trop grand respect pour l'art et la dignité
de l'artiste. Parmi ses œuvres gravées, on distingue un concert
et des études, trop difficiles je crois pour atteindre à la popula-
rité, mais d'un mérite assez réel pour les placer à côté des ouvrages
de Kreutzer, de Baillot, de Locatelli et de Gavinics. Ceux qui
prendraient la peine de les lire avec attention, fussent-ils com-
me le plus grand* nombre des amateurs incapables de saisir avec
précision leurs positions ardues, leurs grands écartements de
doigts, apprécieront les trésors qu'elles renferment, y admireront
une mélodie toujours distinguée et originale, une phrase large,
savamment développée, et surtout une connaissance approfondie
des ressources et de la variété d'effets que présente le violon aij
moyen des divers coups d'archet et du timbre différent de ses
quatre cordes.
  Quelle que fût l'habileté de M. Baumann, elle ne décourageait
pas les plus novices : loin de les effrayer pour l'aspect du labor