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44 LES ECORCHEURS gogne ne fut jamais complètement tranquille, et l'on trouve toujours quelque bailliage ravagé par des bandes d'Écor- cheurs. El, qu'on le sache bien, il ne s'agissait pas de troupes isolées, marchant à la débandade au gré des instincts du mo- ment: les Ecorcheurs gardaient, au milieu de leurs excès, un reste d'organisation militaire, et obéissaient à des chefs expé- rimentés, qui se montraient jaloux de leur autorité, et qui étaient soumis eus-mômes à un capitaine général. Plusieurs fois les Ecorcheurs formèrent de véritables corps d'armée de dix à douze mille hommes. Qu'on se figure une province l i - vrée presque sans défense à une armée de douze mille bri- gands ! « A chacune de ces invasions, que souvent rien ne faisait prévoir,le duc de Bourgogne, son maréchal, ouïe gouverneur de la province opposaient des armées levées à la hâte, qu'on dirigeait sur les points menacés. Mais ces secours arrivaient rarement en temps utile, retardés qu'ils étaient par les len- teurs inséparables des convocations d'arrière-bans. Aussi les Ecorcheurs échappèrent-ils toujours aux poursuites, soit qu'ils ne s'arrêtassent jamais en un lieu que le temps néces- saire pour achever le pillage, soit que leurs chefs eussent avec certains seigneurs du pays des arrangements qu'ils prenaient à peine le soin de lenir secrets, et dont nous avons trouvé la preuve éclatante. C'est ainsi que les sei- gneurs de l'Auxois, en hébergeant dans leurs châteaux les chefs des Ecorcheurs, réussirent à les éloigner de leurs terres, au détriment des terres voisines qui, moins bien pro- tégées, portèrent le poids du fléau. Cette trahison fut si p u - blique, qu'en 14-38, le duc fil commencer, contre ces sei- gneurs félons, une instruction criminelle -a laquelle nous empruntons ces détails. « Au reste, le désordre était partout dans ces moments critiques, et telles étaient les mœurs des soldats, que les habi-