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20 DU SURNATUREL qu'on le croie bien, quelque atticisme difficile. Au fond, je souffre de ces tentatives de soulever la pierre funèbre et d'arracher a la dépouille sacrée des morts des lambeaux suspects tâchant de simuler la vie. Qui nous garantira la religion des ancêtres, si le premier venu peut faire com- paraître au ban de son étrange fantaisie ceux qui portè- rent notre nom et qui disparurent nous laissant l'indes- tructible souvenir de leurs exemples et de leurs vertus? Qui donc peut se croire permis de descendre dans les tombes où s'est ensevelie une partie de mon cœur avec la mémoire à vénérer des êlres a qui je dus sur terre de connaître le bonheur des saintes affections et des dévouements ineffa- bles? Non, ce silence de la pierre m'appartient, ces ténèbres sont ma clarté, cette mort est a moi, n'y touchez point! Je vous préviens que c'est moi tout entier qui palpite dans ces restes chéris que le trépas n'a fait que diviniser pour le culte éternel de mon âme : sachez que si vous y portiez une main téméraire, en montant la parade de vos prodiges, je m'élèverais de toute la hauteur de la nature humaine of- fensée pour protester et me venger. La fin prochaine sans doute de ce retour a la vieille superstition d'évoquer les esprits, il faut l'attendre non pas seulement pour que la science soit justifiée et le bon sens absous, mais pour que la morale des familles soit satisfaite, pour que le cœur et la religion retrouvent le respect qui leur est dû et que la mort se voie rendre sa majesté. Mais ce n'est point Ta que gît, a vrai dire, la ténacité du sentiment qui poursuit le merveilleux, en humiliant l'autorité de nos sens et en taxant d'insuffisance ou de préjugé les sciences naturelles. Il y a un merveilleux qu'on croit possi- ble à l'aide d'agents physiques dont l'homme serait a même d'obtenir des secours extraordinaires. 11 y a un merveilleux encore que l'on imagine pouvoir tirer de l'âme toute seule