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DE LA DOULEUR DANS LE TEMPS. 79 Sur cette effrayante disproportion au sein de l'homme je n'émettrai qu'une simple vue : L'homme aurait-il autant de grandeur, s'il n'était chargé que de son propre poids ! La liberté, cette énorme puissance confiée à un être si frêle , pouvait-elle ne servir qu'à celui qui l'exerce ? La douleur, celle épreuve aussi redoutable à l'être que le néant, pouvait-elle ne profiter qu'à celui qui la porte? L'Eglise ne nous a-t-elle pas appris que par le su- blime phénomène de la communion des saints , la commu- nication des biens spirituels est établie entre toutes les âmes qui travaillent encore sur la terre , celles qui régnent dans le Ciel, et celles qui se purifient dans le Purgatoire. Nous communiquons avec les âmes qui régnent dans le Ciel en ce que , les invoquant par nos prières, elles intercè- dent pour nous auprès de Dieu et que nous participons à leurs mérites. Nous communiquons avec les âmes qui se pu- rifient dans le Purgatoire en ce que, leur appliquant nos prières, nous les soulageons par nos bonnes œuvres et les faisons participer à nos mérites. Ce dogme sur lequel reposent la force de ceux qui vivent et l'espoir de ceux qui meurent, ce dogme qui lie le Ciel à la terre et la terre avec les lieux définitifs de l'épreuve , r e - pose lui-même sur la liberté. Alors ces trois hommes , l'homme triomphant, l'homme militant et l'homme souffrant, ne forment qu'un seul être dont un pied s'est déjà posé dans le Ciel. C'est ainsi qu'à la lumière de l'infini, tous les hommes reparaissent les membres les uns des autres. Les mérites de chacun se répandent sur tous, dans ce mysté- rieux corps, par le canal de la réversibilité , véritable réta- blissement de la circulation du sang de l'humanité. Une aussi merveilleuse réversibilité où pourrait-elle prendre sa source, si ce n'est dans une unité plus merveilleuse encore ; unité et solidarité de l'être , au fond , dont notre raison ne »