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47é VOYAGE AUTOUR D ' U N TIROIR Un vautour, qui croisait là -haut, Surprit l'imprudente parole : « — Ami, quand l'aile fait défaut, » Dit-il, « c'est par autrui qu'on vole. Veux-tu voler ? Viens sur mon dos. Je sais par cœur l'espace immense, Et je connais là mille échos Qui feront valoir ta romance. Je veux, dans le ciel des chanteurs, Te rendre aujourd'hui populaire; De l'aigle même, en ses hauteurs, Le suffrage est fait pour te plaire. — A quel taux cela revient-il? » Fait l'oiseau pressé de souscrire : « — Bon! notre ami pinson veut rire; Passons ce détail puéril. — Tope! » On se donne patte et griffe, Et, dans l'azur ètincelant, Les voilà lancés. Mons Roland Moins fier enfourcha l'hippogriffe. Cependant, un œil en dessous, Notre illustre égrenait ses notes, Et, d'en bas, verdiers et linotes D'applaudir, bien qu'un peu jaloux. Aucuns disaient : «, Sa chance est belle ! Chante-t-il lien ? — On le prétend; Mais vers la sphère solennelle Où tout se voit, d'où tout s'entend, Qu'un gros nous porte sur son aile, Et nous en ferons bien autant. » Ils chevauchaient depuis une heure; On arrive au Pic des Aiglons. Le vautour dit : « C'est ma demeure; Descendez, mon cher, et réglons. — Grâce à vous, le succès me pose; Grand merci ! » dit l'oiseau léger.