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               SUR LA FONTAINE DES JACOBINS                277

 élevé autour d'elle cessa. Plus de pétitions; les magasins
 avaient déposé les armes. Seul, l'architecte, qui depuis peu
osait se hasarder furtivement sur la place, pensait aux sta-
tues et, regardant ses arcades vides, se demandait avec
inquiétude si son monument, trop mince en l'état, ne
serait pas trop gros une fois terminé.
   Le moment vint pourtant où il dut les poser et, le
21 décembre 1885, un long cri d'horreur répondit aux
marteaux des charpentiers, clouant autour des bassins la
quatrième clôture!... « la clôture définitive et sans
remise !... »

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   Cette clôture séjourna deux mois. On y vit entrer, l'un
après l'autre, d'énormes personnages en marbre, plus gros
que les niches, disait-on. On les recouvrit rapidement et,
sous des hangars improvisés, les habitants de la place en-
tendirent la massette et le ciseau retentir du matin au soir
 entre les mains d'ouvriers discrets.
   Le mystère si soigneusement caché fut vite découvert.
C'était bien simple. Le statuaire ou l'architecte, les deux
plutôt, s'étaient trompés dans leurs mesures : il fallait main-
tenant raccourcir des statues trop longues. Deux journaux
graves publièrent la nouvelle, mais oublièrent d'expliquer
si l'on procédait à ce raccourcissement par la tête ou par
les pieds.
   On sut cela d'un sculpteur du quartier Saint-Jean qui
expliqua, pour excuser son confrère, que rien n'était si
commun que de raccourcir ou d'allonger un saint ou une
sainte, selon la grandeur de la niche, en sciant le milieu du
corps et en retranchant ou ajoutant une rondelle, à la de-




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