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294                           FRAGMENTS

  Le texte est accompagné de la note suivante, que je sup-
pose être de Revérony lui-même :
   Ce qui a donné lieu à cette chanson fut un orage survenu au mo-
ment où on allait offrir un bouquet, la veille de la fête d'une mère de
famille ayant pour patronne Marie, dans le mois d'août, en l'an 1776.
Les enfants, au nombre de six, dont quatre fils et deux filles, avaient
engagé leurs père et mère à aller passer quelques jours auprès de leur
tante, à Tassin, pour faire les préparatifs de la fête, ce qu'ils purent
exécuter. Le lieu de la fête était dans la maison de la Favorite, près des
Massues, où les arbres multipliés et les ombrages se prêtaient parfaite-
ment aux dispositions projetées. Toutes les allées étaient décorées par
des chaînes de lampions de diverses couleurs. On avait, par les soins
et le travail du sr V. (1), maître de dessin des demoiselles et ami de la
maison, disposé sur la terrasse un temple en papiers peints, cordes et
pièces de soie, d'une dimension très grande. Le portique laissait aper-
cevoir les portraits, en forme de bustes, de la mère et du père, placés
sur l'autel de l'hymen, et nombre d'attributs et d'autres accessoires
donnaient en quelque sorte une apparence de féerie au local.
    Mais au moment où la mère et son époux arrivèrent, un orage vio-
lent détruisit en un instant tous ces préparatifs, et tout ce qui compo-
 sait l'ensemble du temple fut mis en lambeaux flottant au gré des
vents, et la fête fut convertie en une espèce de deuil. Les enfants fon-
 daient en larmes, attachés au col de leurs auteurs (2), et les assistants
partageaient la douleur, qui devint générale.
    Un des invités à la fête (3), qui avait concouru aux préparatifs avec
 les enfants, voyant l'état de tristesse où tous étaient plongés, monta
 dans un appartement, se fit apporter les habits du jardinier et, après
avoir composé la chanson dont il est question, il monta sur un petit
théâtre composé à la hâte, sur lequel il chanta les couplets qu'il venait
de faire, ce qui fit diversion à la douleur, rétablit un peu de gayeté, et


  (1) M. Villionne. (Noie du manuscrit.)
  (2) L'autel de l'hymen, l'époux, les auteurs, sommes-nous assez au
temps où l'on fondait en larmes à la lecture de la Nouvelle Hèloïse?
  (3) C'est Revérony lui-même, qui n'était pas encore membre de la
famille.