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LA 174 NATIONALITÉ CELTIQUE cette doctrine aux adorateurs mêmes des idoles. Si, dans la Gaule et la Celtibérie romanisées, on a rabaissé Lugus au rang de Génie, il n'y a pas lieu d'en conclure que telle ait été la doctrine celtique. Je crois plus dignes de confiance les monuments irlandais qui ont échappé à l'influence romaine. Un des faits les plus importants de la mythologie irlan- daise est la bataille de Moy tura, en vieil irlandais cath Maige Tured, où les Tuatha De Danann, dieux du jour, du bien et de la vie, triomphèrent des Fomoré, dieux de la nuit, du mal et de la mort. Nous avons sur cette bataille des textes irlandais de dates différentes : deux qui paraissent avoir existé vers la fin du ixe siècle; un autre composé au Xe. Ce fut dans cette bataille que Lug = Lugus tua Balar. Voici comment Lug fit son entrée dans le camp des Tuatha Dé Dannan, à Tara capitale de l'Irlande. Quand il se présenta au portier, celui-ci demanda s'il était maître dans quelque art ou dans quelque métier. « Je suis charpentier », répon- dit Lug. — « Nous n'avons que faire de vous, répliqua le portier; il y a ici un très bon charpentier. » — « Je suis forgeron, » reprit Lug. — «Inutile; nous en avons un excellent. » — « Je suis guerrier de profession. » — « Vous ne pouvez nous servir à rien, puisque parmi nous se trouve Ogma » (13). — « Je suis harpiste. » — « Nous n'avons pas besoin de vous; le meilleur des harpistes est dans notre camp. » — « Je suis poète. » — « Nous n'avons que faire de vous : il y a chez nous un poète excellent. » — « Je suis médecin. » — « Vous ne pourriez nous ren- dre aucun service, nous en avons un très bon. » — « Je suis échanson. » — « C'est encore plus inutile. Neuf (<3) VOgmios de Lucien.