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               SUR LA FONTAINE DES JACOBINS               I15

   La tache avait remplacé ['attache, et la nature morte ré-
gnait. Tout le monde peignait, car tout le monde pouvait
peindre. Les petites demoiselles, si sages autrefois, lâchaient
le couteau à palette, trop fignoleur, pour peindre «à jiclée
de tube ». Mais de si peu de forme que l'on se contente, en-
core en faut-il un peu, çà et là, pour retenir la couleur. —
Heureusement la photographie était là, discrète, inavouée.
Les épreuves instantanées venaient de faire leur apparition.
Agrandies et portées sur la toile par des appareils de projec-
tion, ne vous donnaient-elles pas « la nature même », et
n'était-il pas bien convenu que l'art ne devait être que la
reproduction de la nature ?
   L'artiste n'avait plus qu'à couvrir sa toile, et je vous prie
de croire qu'il se rattrapait sur la pâte ! — Ah ! de 1890 à
1895, c'était la belle époque de la pâte ! Lisez les salons de
ce temps. On les croirait écrits par des boulangers !

                             *
                            * *

   Est-ce toi, loi conservatrice de la nature, équilibre sou-
verain et réparateur, qui, aidé par les progrès de la chimie
et l'âpre soif du gain, nous a rendu l'inestimable service de
détruire tant de tableaux, qu'on vit, bien empâtés, figurer
dans les expositions d'alors, resplendissants de lumière sous
le feu de rampes invisibles, dans des salles soigneusement
obscurcies ?
   Si vos falsifications en sont coupables, marchands de
couleurs, soyez bénis !

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  Ceci alla jusqu'au moment où public et peintres ne pu-
rent plus se regarder sans rire; où « instantanée » pour