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492 PIE n. conduite des affaires humaines, pénétré dans les arcanes de la politique, entendu le langage de l'égoïsme, de l'ambition, de la jalousie et de la haine, sont (entés de prendre, l'huma- nité par le revers, d'en assombrir le tableau et de glisser trop de feu dans leurs jugements. iEnéas Sylvius ne se heurte point à cesécueils. Il sait faire la part du bien et du mal à chaque personnage, démêle, avec autant de justice que de sa- gacité les qualités qui le rendent estimable d'avec les défauts qui lui méritent le blâme, et ne se laisse jamais emporter à ces vindicalives indignations que ne rachètent ni le talent de l'écrivain ni la légitimité de la cause qu'il défend. Une partie difficile et délicate de l'histoire, c'est le por- trait. Je dis une partie difficile et délicate^parce qu'il faut une profonde connaissance des hommes pour saisir, à travers les obscurités de la dissimulation, les traits de leur physio- nomie, d'abord, puis beaucoup de goût, de finesse et de tact, pour en composer leur figure véritable, sans la surfaire ou l'amoindrir. C'est là que l'historien triomphe ou échoue, qu'il montre s'il est un grand peintre ou un vulgaire artiste. iEnéas Sylvius a esquissé un grand nombre de portraits, soit dans les commentaires, soif dans ses autres ouvrages. En les lisant, on voit qu'il se plaît à ces coups de pinceau, et il réussit merveilleusement à les donner rapides et heureux. Oa me saura gré d'en citer un échantillon, je choisis le por- trait d'un archevêque de Florence qui fut à la fois un grand homme et un saint. Je me permets de traduire : « Dans le môme temps, passa au Seigneur Anlonin, arche- vêque de Florence, de l'ordre des Frères prêcheurs, person- nage vraiment digne de mémoire. Il dompta l'avarice, foula aux pieds le faste, ignora les moindres satisfactions de la chair, n'usa du manger et du boire que pour la seule néces- sité. Jamais il ne céda à la colère, à l'envie, ni à aucune autre passion; prédicateur populaire encore qu'il déclamât