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290 LES SOULIERS. Comme d'un grain produire à la lumière, Par don d'écrire, une moisson entière : Mais, si ce grain venait à me manquer, Vous n'auriez rien, beau lecteur, à croquer. Bien cst-il vrai, quand le diable vous tente, Qu'à certains coups, quelquefois, on invente; Mais rarement on a d'heureux effets : Les contes bons dès longtemps sont tous faits, Et les premiers venus à ce royaume Dans ces beaux champs n'ont laisse que le chaume. Cherchons s'il reste encor quelques épis : J'en rencontre un, quoique des plus petits, Et vais vous faire une histoire effroyable. Mais signez-vous, car il s'agit du diable: Puis ne sachant jusqu'où vont les hasards, Fermons la porte, et couchons les moutards. Vers seize cent, vivait une comtesse Auprcc d'Anvers, d'Hornoc était son nom ; Comme il convient, ficrc de son blason; Qui n'aurait pas partagé sa faiblesse, Quand tant de gens sont épris des appâts, En notre temps, de celui qu'ils n'ont pas ? Il faudrait loin, retournant en arrière, Des jours passés remonter la rivière Pour rencontrer cette calme fierté, Les grands beaux airs, le port, la dignité, Les blanches mains, les petits pieds, la grâce, Dons naturels de ces dames de race, Dont le sang pur n'était pas empâté Du sang grossier d'un aïeul à besace, Et pouvoir faire un beau portrait ad hoc De ce qu'était la comtesse d'Hornoc.