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198 MOUVEMENT PHILOSOPHIQUE EN ALLEMAGNE.
ses oscillations de l'esprit allemand au XIXe siècle ; et
la France fut la cause fort indirecte, mais principale, de
ce mouvement. La France, an temps de l'Empire, en
faisant peser sur l'Allemagne un joug de fer, lui rendit
la conscience de son unité morale, de sa nationalité.
Ces peuples, privés depuis si longtemps de toute vie poli-
tique, de toute initiative, en prenant les armes contre
nous dans la grande insurrection de 1813, sentirent pour
la première fois qu'en dépit du morcellement territorial,
l'Allemagne pouvait avoir une pensée commune et par
conséquent une vie.
Ce mouvement, si on le considère par certains côtés,
fut grand et fécond. Nous jugeons maintenant avec
l'impartialité de l'histoire ces luttes où nos pères furent
engagés. Si l'héroïsme du devoir accompli jette sur les
débris expirants de notre grande armée une magnifique
auréole, nous n'hésitons pas non plus à reconnaître ce
qu'il y eut d'héroïque dans cette révolte contre la domi-
nation étrangère, même quand cette domination c'était la
» nôtre. Mais l'esprit allemand sait rarement, dans les cho-
ses de la vie pratique, garder une juste mesure. De ce
mouvement naquit une littérature haineuse, qui est
digne d'admiration sans doute au moment de la lutte,
lorsque Théodore Kcerner, au milieu du bruit des camps,
écrivait ses magnifiques odes recueillies sous le titre de
la Lyre et l'Epée ; lorsque Riïckert publiait ses Sonnets
cuirassés (geharnischle Sonnette), mais qui dépassa tou-
tes bornes au lendemain de la victoire. Les nouvelles
écoles prirent pour mot d'ordre la guerre acharnée aux
idées françaises; les jugements littéraires de Schlegel mé-
connaissant le génie de Racine et de Molière, au lieu d'être