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          ETUDE DE TÊTE DE FEMME PAR LOUIS DAVID.
                                 SIMPLE   NOTE.

   Le musée de Lyon s'est enrichi d'un très-remarquab'e tableau qu'il doit
à la libéralité de M. Thierry Brôlemann , vice-président de la Commission
municipale et président de la Commission consultative des beaux arls. Ce
tableau , dû au pinceau du célèbre peintre Louis David , est une étude de
tête d'une femme âgée. On a prétendu que c'était le portrait d'une de ces
abominables mégères qu'on nommait tricoteuses , et qui remplissaient les
tribunes de la salle de la Convention, d'où elles encourageaient du geste et
de la voix les motions sanguinaires des représentants siégeant au sommet de
la montagne. Je pense qu'on ne peut rien affirmer à cet égard. Quoi qu'il en
soit, l'artiste a su idéaliser cette tête et lui communiquer un véritable at-
trait. David et les peintres de son école ont été idéalistes et ont même par-
fois dépassé les limites. C'est pour cela que les réalistes contemporains
poursuivent de critiques passionnées ces ennemis du laid et de l'ignoble.
   Si le chef de l'école réaliste actuelle avait eu à faire la même étude , il
nous eût probablement donné un spécimen de la laideur physique et mo-
rale. Ses parlisans eussent admiré le bien rendu et l'habileté du pinceau et
préféré la laideur à la beauté. Il est, en effet, beaucoup plus facile de ren-
dre le laid que le, beau, et, en admirant le laid, on se donne en même temps
un brevet de talent.
   Louis David avait une imagination exaltée qui le conduisit à de déplora-
bles exagérations révolutionnaires. Il était l'ami de Robespierre auquel il
disait : « Si tu bois la ciguë, je la boirai avec toi. » On connaît la fin de ces
deux hommes : l'un mourut.sur l'échafaud qu'il avait dressé, l'autre vécut
et ne se montra pas scandalisé des faveurs impériales de tout genre.—Ces
revirements sont fréquents. — On voit que David était plus démagogue à la
surface que dans le fond, et que, pour absoudre des doctrines dont la mise
en pratique, se résolvait dans la glorification sanguinaire de l'échafaud, il les
idéalisait dans son imagination. II se pourrait donc que l'étude en question
fût effectivement le portrait d'une tricoteuse, et alors nous ferons remar-
quer combien le peintre a relevé le caractère de celte horrible créature.
On reconnait que celte femme âgée a été belle dans sa jeunesse ; sa tête a
une énergie qui va jusqu'à l'héroïsme et qui impressionne poétiquement le
 spectateur. Le bien rendu et la fermeté sont admirables, et ces qualités lui
vaudront peut-être les louanges de l'école de M. Courbet ; mais nous pro-
testons de toutes nos forces conlrc l'épithète de réaliste donnée par quel-
ques personnes à cette étude, et nous persistons à la regarder comme l'ex-
pression d'un idéalisme bien senti. Nous croyons être l'interprète des amis
des arts en remerciant M. Brôlemann du don fait au musée de notre ville.

                                                    Paul SAIST-OLIVE,