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270                  CONCOURS DE POÉSIE.

des Goths, ce fut le mot d'ordre sans relâche de la poésie
depuis le doux Pétrarque jusqu'à Filicuïa, Fantoni ouLéopardi.
Et qui sait pour quelle part n'est pas entrée dans le succès
de la cause de l'indépendance ce soin constant de la poésie
à attiser la flamme du patriotisme? Qui sait ce que l'Italie
ne devrait pas de sérieuses actions de grâces a ses poètes,
gardiens de cette vigueur que l'imagination unie h la foi
conserve excellemment dans les âmes ? Tandis que chez
nous (qu'on nous pardonne cette réflexion chagrine), le
compte de la poésie jadis appliquée a l'expression des sen-
timents du pays et à l'histoire nationale serait peut-être vite
fait entre le chant de la Marseillaise et l'immense profanation
commise par Voltaire contre la vierge de Vaucouleurs.
   Dans nos lyriques français, il y a deux choses, dont nous
ne prenons pas facilement notre parti. C'est d'abord cet ori-
peau de paganisme qui était encore d'usage hier, qui se re-
trouve jusque dans les odes sacrées de Jean-Baptiste Rous-
seau et qui mettait les vers sous la banale invocation de
Neptune, Mars, Théinis ou Bellone. C'est ensuite que la poé-
sie n'ait pas servi a bercer le patriotisme. Lebrun serait
presque seula excepter d'une condamnation sous ce dernier
rapport. Encore serait-il permis de ne pas l'estimer à un
taux fort élevé de gloire poétique ni de reconnaissance na-
tionale ; car, outre la médiocrité de son lyrisme, il a été un
exemple de ces poètes sans foi bien- profonde, mobiles es-
prits obéissant h leur caprice ou a la pente des événements,
cygnes au changeant plumage, qui chantent plus d'une
cause.
   Notre moderne poésie ferait bien en cela d'aspirer a des
louanges plus hautes que celles qui s'accordaient dans le
passé aux jeux élégants de la lyre- Elle y a déjà admirable-
ment réussi dans les genres les plus élevés, et plusieurs
fois, loin du vase du moineau de Lesbie, elle a touché avec