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192 CONCOURS DE POÉSIE. le même climat que nous, liée contre nature trop longtemps aux destins de l'Italie et qui méritait de nous appartenir, comme une autre Bretagne de l'Est, par son esprit héroïque de religion et de fidélité ? Au moins, n'avions-nous pas a tort et trop présumé de l'empressement qui serait mis à répondre a notre appel. Dix-neuf pièces de vers ont été envoyées a l'Académie, et quelques-unes par leur étendue étaient de véritables poèmes. Comme on peut le pressentir, tout n'était pas fleur de poésie dans le champ si large a parcourir de notre concours. Plus d'une pièce nous a montré de ces vers corrects ou tout au moins réguliers, construits selon les règles de la pro- sodie, mais faibles, incolores, inexpressifs, de peu de diffé- rence avec la prose et singulièrement propres a justifier l'opinion par trop irrévérencieuse du roi de Savoie Charles- Emmanuel Ier, qui appelait les vers des demi-lignes. Heu- reusement que Charles-Emmanuel se connaissait mieux en politique et au métier des armes qu'en poésie. Nous avons eu aussi, 'pourquoi ne pas le dire, des compositions qui accusaient des versificateurs novices et prenant avec la rime, sans égard au jugement de l'oreille, d'étranges libertés. Il nous a fallu commencer par mettre a l'écart un très- grand nombre de ces œuvres évidemment trop au-dessous des conditions d'un concours académique. Mais cette sévé- rité de la condamnation littéraire n'a pas été pour nous sans de fréquentes approbations qui la contre-balançaient. La où le vers était le plus défectueux, l'amour du pays éclatait toujours ; l'inhabileté de la forme lyrique laissait 'a décou- vert pourtant le mérite de l'inspiration ; les pépites d'or du patriotisme étaient parsemées jusque dans les landes de la poésie. Il était difficile de ne pas être touché, gagné de sympathie secrète, ému d'une envie d'applaudir pour ceux qui avaient en définitive exprimé les vrais sentiments de la