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46                      LES ÉCORCHEURS

exacte des malheurs qui fondaient sur ces pays conquis en
pleine paix. « Les Routiers, dit un témoin oculaire, sont en-
« très plusieurs fois en Charollais, où ils ont fait mille maux,
« comme prendre prisonniers, meurtrir gens, voler églises
« et fermes, rançonner hommes et femmes et aussi le bétail,
« brûler maisons et gerbiers, brûler et gâter les blés et autres
« innumérables maux. »
   Un autre témoin affirme que les Sarrasins seuls peuvent
faire autant de mal.
    Ces extrêmes violences et les cruautés raffinées dont nous
avons retrouvé de lamentables récits, étaient ordinairement
commises froidement et sans autre but que d'extorquer des
sommes d'argent. Le rançonnement ou plutôt Fappalisse-
ment, comme on disait alors, était la grande affaire des
Ëcorcheurs ; ils tuaient quiconque ne se pouvait rançonner ;
ils torturaient le fils pour obtenir l'argent du père, et la mère
voyait sa fille forcée sous ses yeux, si elle ne pouvait fournir
le prix de sa rançon. Ils avaient poussé si loin l'habitude du
meurtre et du vol. que, par un odieux simulacre d'ordre et de
 régularité, ils fixaient d'avance le prix du sang, tant pour
un homme, tant pour une femme, tant pour un enfant. On a
peine à comprendre ces excès et surtout la facilité avec la-
quelle ils étaient commis.
    « Un individu pouvait payer quatre ou cinq fois: il don-
 nait d'abord sa propre rançon, puis celle de sa famille et celle
de son toit ; il fournissait ensuite sa part dans les rançons du
 village, du bailliage et même de la province , oui, de la
 province, car, h la honte de nos pères, la Bourgogne en fut
 une fois réduite à cet excès de misère et de dégradation, de
 ne pouvoir se sauver qu'en marchandant la commisération des
 Écorcheurs. En 1438, le seigneur de Charny, gouverneur de
 Bourgogne, ne trouve rien de mieux, pour s'en débarrasser,
 que de leur accorder, par un traité en bonne forme, un ap-