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BIBM0GRAP111K. 329 Une grande partie, en effet, la plus grande partie de ces volumes consiste en extraits de lettres et papiers de lord Byron, et on ne saurait trop louer l'habileté que M. Moore a montré à les choisir et à les mettre en ordre. Ce n'est pas que nous n'ayons parfois remarqué , dans ces deux gros in-4», une anecdote omise, une lettre supprimée, un nom caché sous des astéri- ques, ou des astériques qui ne cachaient pas de nom. Mais il est impossi- ble, après un examen général, de nier que la lâche n'ait été remplie avec beaucoup de justice et d'humanilé. Quand on considère la vie qu'a mené lord Byron , sa pétulance , son instabilité, son caractère communicatif, nous ne pouvons qu'admirer l'habileté avec laquelle M. Moore a su si bien tirer parti du caractère et des opinions de son ami, sans porter atteinte aux sentiments de la personne, Les extraits des journaux et correspondan- ces de lord Byron sont précieux au plus haut degré, non seulement à cause des renseignements qu'ils fournissent sur l'homme éminent qui les a écrits, mais aussi pour leur rare mérite comme composition. Les letlres, celles du moins écrites d'Italie , sont du nombre des meilleures de notre langue. Elles sont plus naturelles que celles de Pope ou de Walpole, elles ont plus de fond que celles de Cowper. Sachant que bon nombre d'entre elles n'é- taient point écrites uniquement pour la personne à laquelle elles étaient adressées, mais que, semblables à des circulaires, elles étaient destinées à être lues dans les grandes réunions, nous nous attendions à les trouver ha- biles et pleines de verve, mais dépourvues de naturel. Nous avons cherché attentivement des preuves de raideur dans le langage et de gaucherie dans les transitions. Nous avons été agréablement trompé , cl nous devons avouer que , si le style épislolaire de Byron est artificiel, c'est un rare et admirable exemple de cet art sublime qu'en ne saurait distinguer de la nature. Quant au profond et douloureux intérêt qu'excite ce livre , aucune ana- lyse ne saurait en donner une juste idée. On ne trouve guère d'exemple, dans aucun roman, d'aussi triste et d'aussi sombre histoire , et nous n'en- vions guère le moraliste qui la lirait sans attendrissement. La jolie fable dont la "duchesse d'Orléans a orné Io portrait de son fils le régent, pourrait, avec quelques changements , s'appliquer à Byron. Toutes les fées, à l'exception d'une, furent appelées auprès de son berceau. Toutes lui prodiguèrent leurs dons. L'une lui donna la noblesse ; une autre, le génie; une troisième, la beauté. Une maligne fée que l'on n'avait point invitée, arriva la dernière, et, incapable de détruire l'œuvre de ses sœurs, elle mêla une ma- lédiction à chaque présent. Dans le rang de lord Byron, dans son esprit, son caractère et sa personne même, il y eut un étrange assemblage de vices et de vertus. Il était né avec tout ce que les hommes ambitionnent et ad- mirent. Mais à chacun des grands avantages qu'il possédait de plus que les autres, se mêlait quelque chose de misérable et de bas. 11 était issu, à la vérité , d'une maison ancienne et noble, mais dégradée et appauvrie par une série de crimes et de folies, parvenues à une scandaleuse publicité. Le parent auquel il succéda était mort pauvre, et sans la clémence des juges, il aurait péri sur la potence (1). Le jeune Pair avait de puissantes facultés intellectuelles, mais son esprit avait quelque chose de défectueux. Naturellement généreux et sensible, son humeur était souvent chagrine et irritable. Il avait une tête que les statuaires aimaient à reproduire, et un pied dont les mendiants imitaient la difformité daus les rues. Bemarqua- ble à la fois par la force et la faiblesse de son intelligence, affectueux quoi- que pervers, lord pauvre, cl beau boiteux , il avait , plus que personne, (1) 11 avaii tué un homme dans imo rixe. M