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VISITE A SANT' 01N0F1SI0. 99 racontent des merveilles de ses premières années. A peine âgé de six mois, dit-on, au lieu de bégayer quelques sons inar- ticulés comme les autres enfants de cet âge, il prononçait déjà des mots entiers d'un timbre de voix harmonieux et argentin. On connaît surtout son malheureux amour, mais toutes les affections étaient profondes et passionnées dans cette âme immense et ardente. Lorsqu'à l'âge de dix ans, et ses adversités commencèrent alors, il fut séparé de sa mère Porcia qu'il ne devait plus revoir, son déchirement de cœur fut tel que l'impression de ce moment douloureux ne s'effaça jamais de sa mémoire, lui demeurant présent et amer dans les circonstances les plus cruelles de sa vie. Son père, homme d'un grand caractère et d'un beau talent, mais dont la renommée littéraire s'est absorbée dans l'éclatante gloire de son fils, trouva toujours en lui, dans des jours de rude épreuve, amour, respect, soumission sans bornes, consola- tion et appui. Les amitiés du Tasse furent sincères, loyales, dévouées et brûlantes comme son cœur! seulement trop expansives, trop complètes pour son repos et sa sûreté. Ce sort lui est commun avec toutes les natures aimantes et élevées. Doué d'une organisation morale excessivement délicate, ainsi qu'un véritable artiste, il souffrit des maux qui lui furent faits bien au-delà de ce que les hommes ordinaires peuvent ressentir ou comprendre. Cependant sa seule ven- geance fut d'effacer de sa nouvelle Jérusalem (la Jérusalem reconquise) la louange de ses persécuteurs, justice qu'il devait à la vérité autant qu'à lui-même. Ensuite, sans fiel, sans ressentiment, lorsqu'il connut l'homme généralement si mauvais, et la terre si âpre, si dure, serrant encore la main toujours chérie du peu d'amis qui lui restaient, il détourna les yeux de toutes les choses éphémères pour les fixer uniquement vers ce monde serein et immuable où déjà l'avait précédé et l'attendait Eléonore; en sorte qu'on pourrait