page suivante »
LE PÈRE DE LA CHAIZE. 495 Ce pamphlet et d'autres satires, dont plusieurs étaient l'œu- vre d'hommes considérables , obtinrent dans le public le plus grand succès (4). Ces critiques excédaient sans doute la charité chrétienne, mais le prélat semblait n'avoir rien négligé pour les faire naître. Quoiqu'il passât éternellement sa vie « au milieu des personnes les plus propres à lui adoucir les mœurs, » (2) rien n'égalait la brusquerie et la rudesse de ses manières (3). Il s'était fait un grand nombre d'ennemis, que ses énormes prodigalités et le luxe inouï dont il s'entourait, ne contribuaient pas peu à rendre plus ardents. Les Jésuites, qui avaient été le plus maltraités dans l'ordon- nance de l'archevêque de Reims, furent ceux qui mirent le plus de formes dans leur réponse. Un des membres les plus savants de leur Compagnie , le P. Daniel, traita la question d'un ton sé- rieux et grave. Il publia, sous le nom de Remontrance, un mé- moire aussi respectueux dans les termes, qu'il était au fond plein de force. Il y réduisait à néant les opinions avancées par le pré- lat, et il prouvait victorieusement l'orthodoxie des deux thèses soutenues par les Jésuites. M. de Reims essaya vainement de préparer une réplique, et comme les arguments lui faisaient dé- faut, il ne trouva rien de mieux que d'attaquer les Jésuites sur l'irrégularité de la procédure. En conséquence, Louis XIV or- donna que l'affaire fût soumise au parlement, non pas pour y être examinée au fond, mais tout simplement pour décider s'il y avait ou non quelque vice de forme. Des deux côtés on se préparait avec ardeur à l'attaque et à la défense, « lorsque de Harlay, ma- gistrat d'une prudence, d'une intégrité et d'une habileté consom- mées, représenta au roi que l'affaireri'étaitpas d'une nature à être plaidée en plein Parlement. » Le roi n'hésita point à se rendre à ces bonnes raisons, et pour éviter le scandale qui n'eût pas man- qué de rejaillir sur l'épiscopat de France, il voulut que M. de (1) Voir le même et Berault-Bercaste], Hist. ecclésias., t. 9, p. 3S7 et suivantes. (2) Berault-Bercastel, t. 9, p. 588. (3) Voir la Correspondance de Mmf! de Sévigné.