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300            DE LA PHILOSOPHIE DE L'HISTOIRE.

de l'histoire, l'auteur constate-t-il du moins une loi, un or-
dre quelconque de faits propres a la science ? Non, il dé-
peint successivement le monde oriental, le monde persan,
le monde grec, le monde romain, le monde barbare, le monde
féodal, le monde de la renaissance et le monde moderne ;
dans tous ces mondes, de l'un à l'autre, le passage se
fait par une vague évolution qui dénote sans doute un pro-
grès, mais qui ne permet pas d'en saisir le caractère nette-
ment tracé, et qui, en se rapportant principalement aux
formes politiques , omet trop le point de vue moral d'après
lequel le progrès devrait être avant tout jugé. En définitive,
ces peintures des mondes différents ne sont que de l'histoire
résumée en aperçus généraux tels que le goût moderne les
aime. Sauf un peu d'empâtement germanique, le pinceau y
a laissé plus d'une touche brillante. Mais quand on y cherche
autre chose, quand on s'attend a y trouver l'indication du
plan suivi par la Providence dans la conduite des sociétés,
ou, en d'autres termes, la grande loi de l'histoire, on éprouve
une complète déception.
    C'est le moment de conclure.
    Nous avons achevé la revue des systèmes ; nous avons
vu leur vaine bigarrure, leur profonde diversité, leur égale
impuissance. Sous tous ces symboles qui ne peuvent s'ac-
corder , comment pourrait-il y avoir une foi ? avec toutes
ces doctrines différentes où chaque écrivain semble n'avoir
ambitionné que les honneurs de l'originalité, comment pour-
rait-il y avoir une science ? Matière ductile au gré de l'imagina-
tion et prenant complaisamment la forme de tous les rêves,
la philosophie de l'histoire a trompé jusqu'ici les espé-
rances qu'elle avait fait naître, et nul esprit sérieux, impar-
tial, libre des préjugés de parti ou d'école ne lui accordera,
s'il faut la juger par les œuvres qu'elle a produites, d'être
une science.