page suivante »
292 DE LA PHILOSOPHIE DE L'HISTOIRE. mière d'Evandre et nier que le génie et les arts puissent ajouter quelque chose à la félicité humaine. Ailleurs, quand le caprice poétique a changé, il salue en espérance une épo- que où les hommes, rendus meilleurs par la civilisation, au- ront les uns pour les autres les dispositions les plus frater- nelles. Il croit au progrès et çà et là sa croyance semble se voiler des expressions du doute. Une seule conviction le possède, encore ne lui est-elle venue qu'en se mélangeant de généreuses inconséquences pour échapper au panthéisme. Cette conviction, c'est celle de l'influence souveraine des circonstances extérieures. Les nations sont pour lui ce que les fait le milieu qu'elles traversent. Prenez le climat, le site géographique, la race, l'entourage accidentel des faits qui se sont groupés pour produire une constitution politique, avancer ou retarder la culture sociale, et mouler un caractère national particulier, vous aurez toutes les causes génératrices de l'histoire d'une nation. Supposez ensuite les mêmes phé- nomènes se répétant avec une variété inépuisable, vous aurez l'histoire universelle. Le monde des peuples n'est pour Herder qu'un amas infini de combinaisons où la nature extérieure déploie une force prépondérante. Il formule ainsi sa loi de l'histoire : « Toutes choses sur notre terre ont été ce qu'elles pouvaient être selon la situation et les be- soins du lieu, les circonstances et le caractère du temps, le génie natif ou accidentel des peuples. » Que peut nous apprendre une pareille explication ? Nous n'imaginons pas qu'elle soit un trait bien vif de lumière et que ceux qui l'écoutent puissent s'écrier : la science est trou- vée. Si Herder veut simplement nous parler des influences dont nous presse de toute part la nature extérieure et d'où sort, avec des effets merveilleux de beauté , la variété du développement historique, nous penserons comme lui; nous lui saurons gré d'avoir réparé une lacune de Vico et d'avoir