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nommait les « démagogues ardents des Brotteaux ». De Palix, il a été fait mains por-
traits. Nous ne nous arrêterons pas sur ce militant *.
      Un homme, au milieu de tous ces travailleurs en mal de panacée universelle,
semble activer leur zèle, rallumer les feux qui menacent de s'éteindre, relever les
courages. C'est un étrange petit homme, qui de cordonnier était devenu teneur de
livres. C'est Chapitet. Il est Croix-Roussien. Il loge rue des Tables-Claudiennes, 35.
Très petit de taille, difforme, il est un peu délaissé des forts, des beaux gaillards qui
pérorent, parce qu'il est mal à l'aise à la tribune des réunions, et parle d'une voix
blanche et qui traîne. Mais Chapitet est une autorité dans le parti républicain avancé.
Il avait été, déjà, en 1865, emprisonné pour des idées « exprimées avec brutalité ». Il
est, dit le commissaire de police de son arrondissement, « de toutes les réunions poli-
tiques et socialistes contraires à l'état actuel des choses ». Il manie la plume non sans
habileté mais il traduit des idées confuses.
      Non loin de lui, le navetier Durand, qui habite rue Tolozan, a pour Lyon quitté
Villefranche où il a été mêlé de près aux troubles de 1849. Il collaborait, aux débuts de
l'Internationale à Lyon, à un journal de Genève, favorable à l'association. Il est cepen-
dant beaucoup plus attaché au parti radical qu'au parti socialiste.Comme Blanc père,
il ne s'intéresse aux questions sociales que comme moyens d'action contre le gouver-
nement impérial. C'est un homme prudent, très maître de sa pensée et de ses paroles.
      Meyer, lui, appartenait aux chemins de fer. C'est le « cheminot » du temps. Un
peu « tête en l'air », mais vite arrêté lorsqu'il partait trop vite et si bien qu'il fait, au
milieu des plus excités, figure de militant méthodique et raisonnable. « Cet homme,
qui est membre des comités Ferrouillat et Varambon » a été l'un des premiers fonda-
teurs de l'Internationale ainsi qu'on l'a vu déjà.
      Nous avons retrouvé son action aux côtés d'Albert Richard, avec lequel il a, dans
le domaine de la compréhension du rôle de militant, de très nombreux points com-
 muns.
      Faut-il crayonner encore les profils intéressants de Comte, de Mingat, de Mayet,
de Thomain, de Sécrétant 2, de Beauvoir, épicier comme Conchon, et gérant d'une
coopérative dont il aurait rendu « des comptes infidèles », de Bourseau, et de tous les
 autres acteurs d'un rôle appris et pas toujours compris i II serait fastidieux d'examiner
 chacune de ces tâches obscures fondues dans le grand devoir collectif qu'imposait à
 chacun et à tous l'affiliation à l'Internationale ouvrière. Nombreuses furent les
 actions effacées, momentanées et passives de tous ceux qu'Albert Richard gagnait à
 sa cause. Peut-être, telle ou telle réussite de l'idée socialiste, vue du point de vue de
l'Association internationale des travailleurs, a-t-elle été due à la diplomatie subtile de
 tel ou tel de ces démocrates dont les noms s'ajoutent à d'autres noms plus connus que
 les leurs. Dans certain quartier, il y avait des influences plus actives que dans un

     1. « Palix était un homme d'âge, au visage ascétique qu'encadrait une barbe noire, à la parole grave et
lente » (James Guillaume, l'Internationale, ouv. cité p. 244).
     2. Mingot, « républicain socialiste avec les ouvriers, démocrate libéral avec les bourgeois ». Sécrétant; qui
a conservé « toutes les velléités de 1848 » (Arch. municip, de Lyon, série I 3 ).