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 IIOO   fr. environ ; je vous tiens quitte du détail, par conséquent dans l'année
  ou autrement dit pour n numéros je dépenserais 12,100 francs mettons
  14,000 fr. et pour couvrir cette dépense il me faudrait à 20 fr. par an (je ne
  recevrais pas d'abonnement à 3 ni à 6 mois parce que la nature de la publi-
  cation s'y oppose), il me faudrait, dis-je, sept cents abonnés, ou par dépar-
 tement huit.
       « Je crois qu'ici il serait facile d'en trouver beaucoup plus. L'idée de
 décentralisation rencontre beaucoup de faveur dans toutes les opinions ;
 les journaux prouvent que dans le midi, à Toulouse, à Bordeaux surtout,
 on est encore beaucoup plus ardent. Je pense donc que l'affaire est très
 faisable. Je sais où trouver des écrivains très forts pour m'aider dans la
 besogne. L'embarras maintenant c'est de trouver un associé (ou deux)
 qui veuille me procurer les 14.000 fr. sans lesquels je ne veux pas commen-
 cer, ne désirant nullement me ficher dans un échec ridicule ou perdre mon
 affaire pour n'être pas en état d'attendre les rentrées.
       « J'ai eu un très long entretien de deux jours avec M. de Kergorlay
 qui est venu ici à Redon exprès pour parler de cette affaire avec moi. Il est
 possible que nous concluions. Mais, entre nous, il est beaucoup trop
 légitimiste à mon gré et j'ai peur qu'il ne songe à nous adjoindre quelque
 troisième qui perdrait la publication aux yeux des gens appartenant à
 d'autres nuances de républicains du lendemain. Je vous en écris donc
avant d'avoir de ses nouvelles et de savoir ses résolutions dernières.
 D'abord pensez-vous que vous pourriez me raccoler des abonnés à Mar-
seille, Avignon, etc. ? Secondement avez-vous une idée que quelqu'un de
vos entours voudrait risquer ces précieux 14.000 fr. dans cette affaire que
je crois très faisable et très bonne ?
       « Notre mère et Clémence parlent de M. Reynard et de M. Gillie.
Il n'y a que vous qui puissiez me dire ce qu'ils peuvent réellement dans
cette affaire. Je pense aussi à Montigny et à Arnold Scheffer, mais avant
de me lancer davantage j'attendrai votre réponse. Je me meurs de maie
rage d'être ici planté comme un cocquecigrue pieds et poings liés et ne
pouvant rien pour moi-même. Si je passe l'hiver ici je serai maigre comme
la nymphe Echo avec laquelle je vous embrasse.
                                                             « ARTHUR ».