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I08               L'ÉCRIVAIN CLAUDE DU VERDIER

et Cicéron avec des airs doctoraux et une voix de péda-
gogue ( i ) .
   Cependant, malgré sa suffisance, du Verdier sent bien
qu'il aura des contradicteurs, et il leur répond d'avance
dans la dédicace de son livre à Achille du Harlay, premier
président du Parlement de Paris. Nourri dès son enfance
dans l'amour des lettres, il est et sera toujours pénétré de
respect pour les bons écrivains; mais ce n'est pas manquer
à ce qu'il leur doit, que de relever leurs fautes. On entend
dire tous les jours, même dans les écoles où on vénère les
philosophes comme des dieux : « Platon se trompe, Aristote
se trompe ». Au reste, ses critiques seront décentes, sans
méchanceté et sans malveillance, sans quoi il n'aurait
jamais pris la liberté de les offrir au plus sage des magistrats.
   Affermi par ces précautions, ces déclarations prudentes,
Claude du Verdier se décide à donner congé à son livre, en
lui adressant ses suprêmes conseils, en le rassurant une
dernière fois sur les périls de la route : Va donc, puisque tu
as la fantaisie de courir le monde ; va sans crainte, le front
haut, modeste pourtant, attentif à ne blesser personne. Ne
t'occupe pas de ce que font les homme, laisse les gens vivre
à leur guise : ton affaire à toi, c'est la littérature ; encore
faut-il être indulgent. Après tout, souviens-toi qu'on ne
peut plaire à chacun. Mais, si je ne me trompe, tu n'es pas
fait pour choir dans les boutiques et envelopper les épices ;
tout est lu, et toute page imprimée trouve un lecteur. On
te dira peut-être que tu as la témérité de t'en prendre aux


    ( i ) Voyez sur ce sujet, les réflexions judicieuses de BAILLET, Jugemens
des Savans, éd. La Monnoye, t. I, 275, et t. II, 13. Cf. COLONIA, Hist.
littér. de. Lyon, II, 782 ; NICERON, Mémoires pour servir à l'hist. des
hommes illustres de laRe'publ. des lettres, XXIV, 283.