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AU PAYS DES CHOTTS 287
quartiers européens couronnés, comme d'un diadème, par
la masse blanche, aveuglante, de sa vieille ville arabe. Les
maisons modernes ont beau monter la garde autour d'elle
et lui faire une ceinture de pierre, elle s'élève toujours
dans le bleu, dédaigneuse des envahissements, calme,
sereine comme une éclatante statue de marbre surmontant,
son piédestal.
Les bagages encombrent le pont, chacun se presse, fait
ses derniers préparatifs gêné plutôt qu'aidé par une nuée
de portefaix demi-nus, sales, déguenillés ; enfin la passerelle
est avancée, nous débarquons.
— Avez-vous une autorisation ?
— Pourquoi faire ?
— Pour avoir le droit de garder vos fusils et vos
cartouches, la loi en défend l'importation dans la Régence.
C'est un employé de la douane qui nous rappelle ainsi la
puissance des règlements administratifs. Il nous en rappelle
aussi,la bêtise, car c'est seulement l'importation des armes
• de guerre qui est interdite. Mais rien n'y fait ; le petit
plomb est une balle, un hammerless une redoutable cara-
bine, il faut nous incliner. Un instant, profitant de l'inat-
tention générale, nous pensons sortir avec armes et bagages
des griffes de la douane; vain espoir, nous étions surveillés,
un agent de police nous poursuit et nous oblige à déposer
nos fusils contre un reçu. Quel bel agent de police à la
culotte rouge, aux bas blancs bien tirés, chaussé de souliers
vernis aveuglants, d'une chéchia triomphante et enveloppé
dans un burnous de laine fine ! Peut-on résistera un aussi élé-
gant .représentant de la loi, même quand il outrepasse ses
instructions ! Nous sommes néanmoins forcés- de nous
mettre à la recherche du commissaire central de police
pour rentrer en'possession de nos fusils. Nous le trouvons