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               PROMENADE TRANSJORDANIENNE                215

serais trop tôt aperçu de la métamorphose, et le batelier,
qui est de connivence, avait mission d'endormir mes
inquiétudes.
    Je me plains ; le brigadier demeure impassible. Son rôle
est de me conduire ; il n'en a pas d'autre. Le reste lui est
indifférent. D'après la carte nous devons marcher à l'est,
dans la direction d'Oum-Queis, où je visiterai les ruines.
Tel est le programme.
    A peine à cheval, le brigadier se dirige au sud et suit le
cours du Jourdain, puis s'enfonce dans un champ d'orge,
où la hauteur des épis est un sérieux obstacle et cache des
fondrières. Enfin nous gagnons un talus, déjà fatigués par
ce début et surtout par les contrariétés qui m'abreuvent.
     Voici la plaine du Ghor, à 220 mètres au-dessous du
 niveau de la mer. Les herbes, naguère en fleurs, commen-
 cent à se flétrir sous l'action torride des rayons solaires.
 Elles dépassent la tête de mon cheval. Nous avançons à la
 file indienne sur une piste de chameaux. Une large crevasse
 barre la plaine. J'aperçois au fond un ruban moiré qui
 scintille dans la verdure. C'est la rivière Yarmouk que le
 guide a voulu contourner jusqu'à son embouchure, pour
 s'éviter la peine de la franchir. C'est pour cela qu'il, m'a
 conduit au sud, en dépit de mes protestations indignées.
 Nous trouvons en effet un pont de basalte, à trois arches
 romaines, jeté sur le torrent qui tombe en cascade et lance
 la blanche écume de ses ondes à l'assaut des roches noires.
 J'en fais la photographie. Nous obliquons au sud-est, vers
 la montagne, et je reprends courage. Mais mon itinéraire
 n'est plus qu'un souvenir. C'en est fait de toi, nécropole de
 Gadara ; mon pied ne foulera point le marbre de tes tom-
 beaux ! Je ne verrai jamais tes ruines, ô cité d'Oum-Queis !
   Les feux du soleil nous dévorent. Je m'enveloppe la tête