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                   D'UN VIEUX GROGNARD                   431

 avait toujours l'air aussi vigoureux sous sa grande barbe
 blanche et ses yeux me parurent encore plus perçants que
 d'habitude. Airelle avait beaucoup grandi et l'originalité
 attachante de sa physionomie, de ses manières et de son
 costume, assez semblable à celui des Tsiganes, excita au
 plus haut point la curiosité de Jeanne et de sa
 mère.
    Nous descendîmes de cheval, et laissant au guide le soin
 de nos montures, nous nous approchâmes du Grand-Pâtre
 à qui je présentai Jeanne, en le priant de nous indiquer les
 simples qui devaient lui rendre la santé.
    Jeanne souriait, tandis que sa mère, impressionnée par
l'aspect imposant et la gravité du guérisseur, joignait à mes
 paroles ses regards suppliants où se manifestait toute la
profondeur de son affection maternelle.
   Airelle m'avait reconnu et ses grands yeux noirs, fixés
sur chacun de nous tour à tour, brillaient d'une flamme
sauvage tempérée par une sympathie visible. Elle s'avança
subitement vers Jeanne et lui baisa les mains.
   Jeanne, touchée de cette manifestation spontanée, em-
brassa de la manière la plus affectueuse l'enfant qui parut
fière de cette marque d'amitié.
   Airelle prit alors Jeanne par la main et la fit approcher
du Grand-Pâtre, en témoignant par des gestes et par des
paroles inintelligibles pour nous, son désir de voir nos
vœux exaucés.
   Le sorcier considéra longuement Jeanne avec une atten-
tion profonde, comme s'il voulait lire à travers l'enve-
loppe corporelle les secrets d'une organisation maladive.
Mais son visage ne laissa rien voir du résultat de cet
examen.