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OCTAVE FEUILLET 387 tout compris. Convaincue que son mari est complice, elle meurt dans une sublime résignation. Le docteur a soupçonné l'horrible mystère. Sabine inter- rogée lui avoue son crime, en invoquant la morale scienti- fique pour se justifier. Tallevant, à ce coup, tombe fou- droyé. Quelque temps après, Vaudricourt, qui ne sait rien, épouse Sabine. La jeune femme se révèle peu à peu dans sa laideur sinistre. Elle déclare un jour à son mari qu'elle ne l'aime plus. Par surcroît, une circonstance fortuite apprend à Vaudricourt le secret du crime et, chose affreuse pour son cœur, qu'Aliette a expiré en croyant son mari coupable. C'en est fait, le mécréant redevient chrétien. Vivante, Aliette avait été impuissante; morte, elle opère le prodige. De là , le titre du roman. M. Feuillet, on le voit, ne s'est point départi de son faible pour le monde des châteaux, qui lui a jusqu'ici fourni la plupart de ses personnages typiques : préférence, après tout, qui l'honore. L'aristocratie, ou du moins ce que l'on nomme encore ainsi, ne forme, il est vrai, qu'une mince couche au-dessus de la masse sociale ; peu d'esprits s'y rencontrent, capables d'entrer dans l'intelligence des temps, mais elle reste une élite où se conserve, — non certes pas chez tous, — un luxe moral, ailleurs trop sou- vent disparu sous les mœurs modernes : la fleur de socia- bilité, les instincts de délicatesse et de courtoisie, le senti- ment de l'honneur, le patriotisme chevaleresque. M. Feuillet peut céder à la tentation de hausser plus que de mesure ses marquis et ses comtesses, mais il n'est pas, comme Georges Sand, un romancier purement subjectif. Il compose à la manière des peintres. Rentré dans son atelier, avec des esquisses et des ébauches d'après nature, il les arrange d'après l'art, quoique en laissant, en certains