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D'UN VIEUX GROGNARD 271
nos poumons. L'homme et la plante dont la dépendance est
déjà si évidente au point de vue de la nutrition, se rat-
tachent donc aussi l'un à l'autre et s'entr'aident par la res-
piration.
Dans nos courses sur les hautes montagnes, l'abbé faisait
observer que plus on monte, plus l'horizon s'élargit, et plus
on sent sa propre petitesse. De même, disait-il, plus on de-
vient savant, plus on voit les questions s'étendre et les solu-
tions s'éloigner, plus on touche du doigt sa propre igno-
rance. Cela ne doit pas empêcher d'étudier encore et de
chercher toujours, ne fût-ce que pour se défaire de la vanité
et des présomptions qu'engendre la demi-science. C'est
ainsi que l'on arrive à ces sommets philosophiques d'où
l'on aperçoit mieux l'immensité de l'âme et du monde. On
y comprend tout de suite que les notions accessibles Ã
l'intelligence humaine ne sont rien à côté de celles qu'elle
ignore et dont beaucoup, sans doute, resteront toujours
hors de sa portée.
L'abbé Velay était enfin grand admirateur des poètes
latins, dont il avait recueilli et classé méthodiquement
toutes les .maximes dans un grand cahier, écrit de sa plus
belle écriture, et qu'il fit plus tard relier magnifiquement.
Il appelait cela son musée de pierreries. Ah! que de fois je
lui ai envié ce volume où se trouvait condensée en quelque
sorte toute la sagesse antique, ciselée, montée en bijoux,
par les plus habiles ouvriers du Parnasse romain, et dont la
prière sublime du Pater formait la dernière page et en
quelque sorte la conclusion pratique ! Quel bonheur quand
il me le laissait parcourir, et qu'il me serait agréable encore
aujourd'hui de l'avoir dans ma petite bibliothèque et de le
feuilleter aux heures de tristesse ou d'ennui! C'est là que
j'ai puisé l'amour des citations latines et .si les iconoclastes