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I90 LES DÉBUTS ORATOIRES ses œuvres, l'évêque de Clermont vieillissant ne se serait-il souvenu que d'une manière vague du lieu de cette bénédic- tion ? N'ayant gardé la mémoire que du temps approximatif où elle s'était accomplie, il aurait glissé la phrase qui nous arrête et aurait ainsi attribué à la ville dans laquelle il séjour- nait et prêchait habituellement ce qui, en réalité, s'était passé dans une autre. Comment le soutenir et le prouver? Peut-être les conjec- tures qui précèdent paraîtront-elles insuffisantes, notre hypo- thèse trop faiblement appuyée. Mais je crois cependant que les deux discours où nous voyons les débuts du grand prédicateur, le sermon aux dragons de Catinat et le panégy- rique funèbre de Mgr de Villeroy, s'appellent l'un l'autre et s'expliquent l'un par l'autre (11). A la cérémonie solen- nelle des drapeaux, le P. Massillon ravit tous les suffrages : son air modeste et grave, sa déclamation aisée, sa voix har- monieuse préviennent tous les esprits, l'attention est naturel- lement portée vers lui, son nom mis en avant et la mission lui échoit sur l'heure de célébrer la mémoire de l'arche- vêque, dont la nouvelle de la mort se répand et jette ses diocésains dans un deuil universel. Comment cette confiance spontanée et populaire fut-elle justifiée par ce jeune oratorien, qui, vingt ans plus tard, en face du cercueil de Louis le Grand, prononcera, en quelque sorte, l'oraison funèbre du siècle tout entier, opposant à toutes ses gloires, à toute's ses renommées, à son éclat et à son faste, la seule Majesté qui ne passe pas, la seule Souveraineté immuable, Tunique royauté sans (11) Notre manière de voir serait confirmée par le P. Bougerel, qui suppose également une liaison entre les deux sermons, en les ren- voyant bien plus tard.