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144 CROQUIS NIÇOIS roulette), le croupier, tirant la dernière carte pour faire l'appoint, en amena deux, sans qu'il fût possible de détermi- ner laquelle était tombée la première sur table. Les joueurs des deux tableaux réclamaient; c'était dans toute la salle un brouhaha indescriptible, augmenté par le flot des curieux qui grossissait de plus en plus. L'administration, agissant royalement, fit droit aux réclamations des deux tableaux. On voit que l'administration est plus que loyale. Cepen- dant, le jour où la suppression de la roulette et du trente et quarante sera décidée (il paraît même que cela ne tardera pas), beaucoup de gens applaudiront. Seule, pâtira la chro- nique scandaleuse, qui enregistre chaque année trop de désastres financiers et de suicides causés par l'affolement du jeu. L'administration achète, à prix d'or, le silence des jour- naux qui ont des velléités d'indignation contre Monte- Carlo. C'est même devenu une spéculation de la part de certains journaux niçois, qui se font positivement entretenir. Elles pullulent ces feuilles de chou qui s'intitulent préten- tieusement journaux du high-life, et si intéressants que personne ne les lit. Un personnage, grassement entretenu par le jeu, est le prince Charles III, qui, annuellement, touche 1,200,000 fr. comme un simple président de la République française. Les Monégasques ne paient pas d'impôt. Le jeu suffit à tout. Du reste, il est de tradition que Monaco vive aux dépens de l'étranger. Les Grimaldi faisaient de la piraterie autrefois. La famille actuelle tolère à son profit une indus- trie qu'on peut qualifier de honteuse, puisqu'elle éveille de cupides instincts; et cette famille a toujours pour devise : Deo juvante (Dieu aidant). Est-ce par ironie ? La salle de spectacle a été édifiée sur les plans de