page suivante »
MON AMI GABRIEL 217 jour. Pendant qu'ils causaient sous le regard distrait de Mme de Bi'nors, Gabriel entrait comme un étranger dans la chambre de sa femme et s'efforçait de regagner son affection par ses prévenances. Un jour, à la vue de Louise et de Francis assis l'un auprès de l'autre, une pensée lui traversa l'esprit. Sous la .sérénité apparente de la jeune femme, n'avait-il pas deviné l'esprit de sacrifice et de résignation ? Depuis ce moment, il ne lui envia plus la paix du coeur, mais il l'aima davantage. Enfin, le sous-lieutenant reçut l'ordre de rejoindre son régiment. — Figure-toi, dit Mmo de Bénors à sa fille, qu'on veut l'envoyer à Toulon !. . . Il faut qu'il demande une pro- longation de congé, car il n'est pas bien portant, il au- rait encore besoin de deux bons mois de repos... Et puis, c'est à peine si nous l'avons vu, le pauvre enfant! Louise, au lieu de répondre, regarda son cousin : — Pars-tu? lui dit-elle. — Oui... répliqua-t-il d'une voix suffoquée. — Si tu veuxm'écouter, reprit la tante, tu ne partiras pas ! . . . Tuas une jolie mine, pour courir les chemins... Il faut obéir aux personnes qui ont le plus d'expérience, ajouta-t-elle péremptoirement.Tu neme fais pas peur avec tes galons, vois-tu ! Laisse-toi faire. Tu seras toujours petit pour moi. Lorsque sa mère fut sortie, Louise baissa les yeux sur son ouvrage et songea un instant à son cousin, qui allait recommencer sa vie de hasards et de dangers, qui était orphelin et qui n'avait d'asile qu'au foyer de sa tante. Mais refoulant cette pensée et accélérant d'une main fiévreuse le mouvement de son aiguille, elle dit briève- ment : — Francis, à quoi te décides-tu ?