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MON AMI GABRIEL (SUITE) La fraîcheur augmentait. Nelly eut une petite toux sèche. — Voilà , dit-elle, le signal de la retraite. Les fenêtres durez-de-chaussée étaient éclairées. La femme de chambre venait de servir le thé dans le petit salon; Gabriel but machinalement et s'éloigna bien vite, comme si un remords l'eût poursuivi. Ce soir-là , il s'endormit tard. Une lutte s'engageait dans son âme. Nétait-il pas aussi frappé au cœur, lui qui se croyait fort ? . . . Quand donc la sympathie avait- elle donné place à l'amour ? . . . Le mal ne s'était-il pas fait à son insu avant cette soirée charmante ? . . . Quel rôle odieux allait-il jouer, s'il dissimulait la passion sous le voile hypocrite de l'amitié ? Mais ses agisse- ments ne seraient-ils pas déjà nuisibles à Nélly, et l'assi- duité de ses visites au chalet ne donnerait-elle pas lieu à de sots propos dans la ville? Rentrée chez elle, Nelly s'était jetée à genoux pour prier : « Mon Dieu ! avait-elle dit, vous m'avez laissée seule dans le chemin de la vie ; mais ne m'abandonnez p a s . . . Je suis égoïste. Je m'attache le cœur le plus gé- néreux qui soit au monde, et déjà , ces liens me trou- blent et m'effrayent. Imprudente que je suis! . . Com- ment cela finira-t-il ? Oh ! mon Dieu, donnez-moi votre force divine. »