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80                      CHRONIQUE LOCALE

 principaux passages, les rues étaient enguirlandées, les fe-
 nêtres pavoisées et fleuries, les habitants amoncelés sur
 divers points ; les lampions couraient d'arbre en arbre en
 attendant l'illumination du soir, les boîtes étaient chargées ;
le théâtre, changé en salle de concert, étalait des tables cou-
vertes de fruits, de fleurs et de sucreries ; des Messieurs en
 habit noir accouraient de Lyon ou des résidences voisines
et se groupaient derrière deux troupes nombreuses de mu-
 siciens, et en tète de cette foule, le conseil municipal mar-
chait gravement avec une harangue de circonstance et des
 souhaits de bon accueil; c'était émouvant et solennel.
   Tout à coup les boîtes détonent, les salves retentissent
le long des bords de la Saône. L'orphéon pousse un hourra,
et la fanfare s'apprête à faire entendre ses plus beaux
airs, dès que Monsieur le maire aura fini son discours.
   Qui donc arrivait ?... qui donc accueillait-on ainsi ? était-
ce un prince ?
   Oh ! c'était beaucoup plus qu'un prince, c'était un ami.
   M. Emile Guimet, l'enfant, le bienfaiteur du pays,, revenu
naguère de faire le tour du monde, s'était marié quelques
jours auparavant, et il amenait sa jeune femme au milieu
 des siens, dans ce pays où il est né et où il est aimé.
   La jeune épouse, émue, rougissante et tremblante, ne savait
comment recevoir ces témoignages si profonds, si bruyants
et si unanimes d'affection, d'amitié, de reconnaissance et
de dévoûment. S'il est des jours qui laissent un souvenir
 dans la vie, c'est bien assurément les jours comme ceux-là.
   Car ils sont rares et précieux, ces témoignages d'élan
 d'une ville vis à vis un simple particulier.
   Si M Emile Guimet a fait du bien dans sa vie, en ce mo-
ment, il en a été largement payé.
   Le cortège entrant en ville traversa les rues parées, la
foule accumulée, les arcs de triomphe ornés, et se dirigea vers
le théâtre où les jeunes gens de" la ville présentèrent le vin
 d'honneur aux nouveaux époux.
   Puis les discours recommencèrent, puis un concert, dont
plusieurs morceaux de M. Guimet lui-même, fut donné par
l'orphéon de Neuville et la fanfare de Fleuriou dont les dra-
peaux chargés de médailles annonçaient de nombreux
triomphes, puis un grand dîner réunit les amis lyonnais,
dîner accompagné de toasts et de discours, et enfin un bal
termina la journée à une heure avancée de la nuit.
   Ce bal avait cela de remarquable qu'on avait l'air de s'y
amuser beaucoup et que les jeunes Neuvilloises en robes de
mousseline ornées de nœuds roses, comme si elles avaient
eu un uniforme, offraient les tailles les plus élégantes, les
visages les plus gracieux et les plus jolis qu'on pût voir.
   Dans les tribunes, les mamans étaient heureuses de la
joie comme de la beauté de leurs filles, et ce n'était peut-être
pas les moins joyeuses de la fête.
   Ah ! si la France avait beaucoup de Neuville-sur-Saône !
                                                  A. V.
             Lyon* — In^rimerie générale du Rhône. — h, FABERT.