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424 HISTOIRE LITTÉRAIRE DE LYON. L'époque où fleurissait dans le siècle le futur évêque de Lugdunum est une des plus tourmentées de l'histoire. Les princes se succédaient au sommet du pouvoir avec une rapi- dité qui tenait du vertige. Nul'e position particulière, si élevée qu'elle fût, n'était à l'abri de ces brusques renverse- ments de l'autorité suprême. De toutes parts, spectacle familier en ces temps désastreux, les plus puissantes for- tunes s'écroulaient atteintes par des révolutions de palais presque journalières. Rome et Ravenne, où la violence arra- chait et donnait des sceptres éphémères, tenaient une moitié du monde dans une anxiété perpétuelle. Soit que le spectacle de cette fatale instabilité des choses humaines eût fait sur l'âme d'Eucher une impression pro- fonde, soit que, renommé pour son amour de la justice et de la vertu, il se crût menacé par quelqu'une de ces révolutions incessantes, on le vit tout à coup déposer le laticlave, abjurer les splendeurs, apanage de son rang et de sa dignité, et partir pour la solitude. (1 touchait à peine à l'âge mûr. L'éclat héréditaire auquel il renonçait semblait devoir sourire encore à sa compagne, plus jeune que lui peut-être; mais, loin de mettre obstacle à ce projet dont le sensualisme de nos mœurs s'effarouche, la vertueuse Galla paraît y avoir donné un complet acquiescement. Cette résolution des deux époux étonna moins que ne le supposent la plupart des biographes de saint Eucher. Le monde, alors, était fréquemment témoin de pareils délaisse- ments des faveurs éblouissantes'de la fortune et de la gloire. Au chapitre précédent, nous avons eu occasion d'en citer d'éclatants exemples. L'incertitude de l'état politique entrait pour une grande part dans le développement de cette pro- pension mystérieuse à l'existence érémit'que; mais d'autres causes y contribuaient. En ces âges voisins delà rédemption accomplie, la foi était plus vive. Puis, l'heure des grandes