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110 CINQ-MARS ET DE THOU. vers ie ciel,il dit : — « Ah! mon Dieu! qu'est-ce que de « ce monde! » —Après qu'ils furent coupés,il porta les deux mains à sa teste comme pour accommoder ceux qui restoienl à costé. Le bourreau s'estant avancé pres- que à coslé de luy ,11 luy fit signe de la main qu'il se retirât ; il fil le mesme (geste) deux ou trois fois ; il prit encore le crucifix et le baisa; puis, l'ayant rendu, il s'age- nouilla de rechef sur le bloc, devant le poteau qu'il em- brassa. Et voyant, en bas, devant luy, un homme qui estoit à Monsieur le grand maistre, il le salua et luy dit : — « Je vous prie d'asseurer M. de La Mettraye que je suis « son très-humble serviteur. » —Puis s'arresta un peu et continua : « Dites-luy que je le prie de faire prier Dieu « pour moy.»-— Ce sont ces propres mots. De là , l'exé- cuteur vint par derrière,avec ses ciseaux,pour descoudre son collet, qui estoit attaché à sa chemise. Ce qu'ayant fait, il le luy osta, le faisant passer par la teste; puis lui mesme ayant ouvert sa poitrine pour abaisser la che- mise et découvrir mieux son col, ayant les mains jointes par dessus le poteau, qui luy servoit comme d'un ac- coudoir, il dit, avec grand sentiment, ces paroles : « Mon Dieu, je vous consacre ma vie et vous offre « mon supplice en satisfaction de tous mes péchés. Si « j'avois à vivre plus longtemps, je serois tout autre que « je n'ay pas esté ; mais, mon Dieu, puisqu'il vous plaist « que je meure, je vous offre ma mort et mon ^ang pour « l'expiation de mes fautes, et de tout mon cœur. » « A ces mots, on luy présenta !e crucifix qu'il prit de la main droite, tenant le poteau embrassé, de la gauche; le baisa, le rendit, et demanda ses médailles au compa- gnon de son confesseur ; lesquelles il baisa et dit trois